L’assèchement des marais du Médoc 

Durant plusieurs siècles, les marais ont été aménagés par l’homme, mais soumis aussi à des luttes d’intérêt entre différents utilisateurs : ceux qui naviguaient sur la Jalle, ceux qui voulaient construire des ponts et des moulins, ceux qui voulaient assécher les palus pour gagner des terres de culture, mais aussi les éleveurs de sangsues. De nombreux conflits ont émaillé l’histoire de cette zone : vous pourrez parcourir les différentes rubriques qui illustrent dans le temps ces luttes d’influence, et en apprécier la littérature : procédés de style, tournure des phrases, respect des bienséances... Notez les différences de vocabulaire et d’écriture entre 1657 et 1807.

Voici le détail des sous-rubriques :

- le traité de 1657 entre le duc de Duras et ceux qui voulaient dessécher le marais, et les statuts afférents,
- le traité de 1807 et les travaux du conseil municipal de Blanquefort,
- les différentes décisions préfectorales de 1844, 1851 et 1852.
- la décision du Conseil d’Etat au contentieux de 1854.

Ces documents nous ont été fournis par un membre du Syndicat des marais, lequel continue aujourd’hui à l’équilibre des différents intervenants sur cette partie de la commune.

Texte d’Henri Bret.

 

De tous les temps, les marais du Médoc étaient la cause d’épidémies dévastatrices. Empruntons à dom Devienne (Histoire de Bordeaux) ces lignes :

«... On en desséchait quelques uns (des marais) de temps à autre, mais l’étendue de l'entreprise et la prodigieuse dépense qu'elle exigeait n'en faisaient envisager le terme que dans les siècles les plus reculés... Quelquefois, les ravages de la peste étaient tels que les communautés les plus austères croyaient tenter la Providence en restant dans leurs monastères et les abandonnaient pour aller ailleurs chercher des asiles. »

Parmi les principales épidémies, citons celles de 1496, 1605 et 1736. Le grand mérite du duc d'Épernon aura été de s'attaquer au problème de façon vigoureuse et sur l'ensemble. Avant lui, les entreprises en ce sens avaient été nombreuses, louables et certes profitables, mais combien dispersées et, de ce fait, manquant d'envergure et de continuité.

En 1599, un accord avait été passé entre la ville de Bordeaux et le Hollandais Conrad Gaussen pour l'entreprise des travaux.

Mais l'impulsion définitive fut donnée par le duc qui passa, avec les Flamands, grands spécialistes, un accord, en 1628, pour l'assèchement de trois cent-vingt journaux, et un second en 1633. De Tholoze, il écrivit à Richelieu, le 25 janvier 1628 : « Monsieur, j'ay passé contract, il y a quelque temps, avec des marchands flamants, habitués à Bordeaux, pour le dessèchement de quelques marais qui sont dans mes terres de Lesparre, et d'autant qu'il a plu au roi concéder quelques privilèges par ses édits aux entrepreneurs de semblables ouvrages, desquels ceux qui ont contracté avec moy veulent supplier très humblement Sa Majesté de les faire jouyr, j'ay creu que vous n'auriez pas désagréable la supplication bien humble que je vous fais, Monsieur, de les despartir ce qui despend en cela de vostre pouvoir et vostre authorité, puisque l'entreprise regarde l’interest de toute la province, et doit apporter beaucoup d’utilité à la Ville de Bordeaux en particulier. Quand toutes ces considérations qui regardent le public, ne se rencontreroyent point dans cette affaire, je ne lairrais pas d'y espérer vostre faveur et vostre assistance, regardant comme elle fait mes interest. »

Les statuts de la communauté des marais de Lesparre furent promulgués le 1er janvier 1646, cependant qu'un nouveau contrat était passé avec les mêmes Flamands relatif à l'assèchement de 5 333 hectares de marais. Si l'on attribue le creusement des Jalles aux Normands, celui des canaux destinés à l'écoulement des eaux des marais date du milieu du 17ème siècle.

Dans la carte de Clerville, dressée en 1650, sont mentionnés les chenaux de : Maire (Meyre), Lamarque, Cussac, Despartent (Espartens), Bessevoille (Beychevelle), Saint-Julien, Saint-Mambert, Goullée, Richard, Saint-Vivien, Talais, Soulac.

Les marais de Blanquefort furent asséchés par Conrad Gaussen, en 1599, puis par Guy de Durfort, en 1657, cependant que Tourny fera élever la chaussée les traversant.

Guy Dabadie, Histoire du Médoc, imprimerie Samie, Bordeaux, 1954, p.156-157.