Château Lescombes 

Le château de Lescombes, situé au 198 avenue du Taillan, s’appelait sous l’Ancien Régime, le château de la Plane, nom de la seigneurie rurale qui l’entourait. Le bâtiment rectangulaire est flanqué de 4 tours couvertes en poivrière. Il est marqué par la mode classique, la sobriété de l’architecture et la symétrie. On ne peut dater avec précisions sa construction.

Au 15e siècle (d’après Édouard Guillon, 1866), il y avait une maison forte qui appartenait à M. de Lalande. Jean de Lalande chevalier, fut seigneur de la Taule du Luc de 1433 à 1465, au château de la Plane ! Jusqu’au milieu du 16ème siècle, on trouve messire de Cat puis Espire de Cat à la Taule du Luc, désignée ensuite par château de la Plane.

Vers 1550, la seigneurie de la Plane appartenait à Jean Dubernet, secrétaire du Roi. Le 4 juin 1598, Gratian de Mullet, écuyer, est sieur de la Plane (après la mort de Jean Dubernet ?) En 1602, Gratian de Mullet partage les dîmes d’Eysines avec le chapitre de Saint-André. Le bâtiment dans sa forme actuelle date de cette époque. Il a succédé à une construction médiévale peut-être détruite par un incendie. Lors des travaux de restauration en 1995, on a retrouvé dans le sol des carrelages calcinés. Le blason des Mullet orné de 3 canards surmonte l’entrée du vestibule du château.

chateau-Lescombes-facade

En 1631, après la mort de Gratian du Mullet, Catherine, sa veuve, fut expropriée et la seigneurie de la Plane a été achetée avec 60 journaux (environ 20 ha) par le prieur du monastère des Feuillants à Bordeaux dont l’ordre possédait déjà la Maison Noble de Bois Salut. Le prieur apporta quelques modifications ; il surmonta le corps de logis d’un pavillon, établit une chapelle et « enferma les cours et jardins dans de hautes murailles flanquées de tours d’observation ».

Le 18 août 1720, les Feuillants vendent La Plane à Benjamin Duret, « bourgeois de Bordeaux et marchand aux Chartrons » chez maître Brun, un inventaire est fait. La famille Duret est protestante. Benjamin Duret est juge de Ponchac en 1685 mais quitte la juridiction pour le commerce. Pour cause de religion, il quitte sa région le Fleix et il s’établit aux Chartrons, associé à Moïse Petit. Il épouse au début des années 1690 Sara Laporte, originaire du Fleix. Il est reçu bourgeois de Bordeaux le 23 juin 1703 ; il fait des échanges avec les Hollandais, ennemis du roi. Il importe des marchandises de contrebande… en mai 1707, il est gracié par le roi, en raison de l’utilité du commerce avec la Hollande malgré son chargement illicite de girofles, de satin à fleur, de bibles, etc. En 1725, son fils Abraham, âgé de 26 ans, se marie avec Catherine Vanderhagen, nièce de Baumgarten, d’origine hollandaise, et qui est le 1er négociant des Chartrons. Abraham hérite de la Plane à la mort de son père, puis Pierre hérite à son tour à la mort de son père Abraham. Pierre Duret ne se met au commerce qu’en 1751 après le décès de son père. Il fait un apprentissage de 3 ans et s’établit marchand à 22 ans. C’est un esprit éclairé qui n’hésite pas à critiquer le régime monarchique et l’assemblée provinciale de la noblesse qui défend ses privilèges. Il épouse, le 1er septembre 1755, Anne Borel, fille d’un négociant de la Rousselle. Comme beaucoup de protestants, ils se sont présentés devant le curé qui faisait une célébration de pure forme, pour donner à leur union un caractère légal ; c’était une pratique courante chez les réformés ! Pierre Duret de la Plane hérite d’un domaine qui comprend en plus du château, 8 hectares de vigne, un jardin, un verger, des pinèdes et des bois, des prairies et les métairies de Langlet et du Sesca dans le marais, aux environs de 80 hectares en tout.

Pierre Duret était protestant et favorable aux idées nouvelles des philosophes et des agronomes. Dans son Livre de Raison rédigé entre 1781 et 1810, il raconte comment avec l’aide de son homme de confiance, François Baquey, dit Panchille, il a mis en pratique à Eysines les idées des agronomes. Disciple de Parmentier, il a introduit la pomme de terre sur son domaine de Langlet. En 1784, Pierre Duret, pour se rendre à son bourdieu d’Eysines, fait emplette d’une voiture anglaise à 4 ressorts, très bien étoffée, peinte en gris vert, à 4 glaces qui lui coûte 1 440 livres (7 fois les gains annuels d’un ouvrier). Sa voiture est très bonne, assez légère et douce. Elle remplace un cabriolet lui servant depuis une douzaine d’années et qui est hors service.

Le 10 septembre 1789, Pierre Duret a été élu président du premier Conseil Municipal et voici ce qu’il en écrit dans son Livre de Raison : « le 10 septembre 1789, les habitants d’Eysines se sont assemblés et m’ont fait l’honneur de me nommer à la pluralité des voix, président de leur Conseil Municipal, l’assemblée du Conseil se tiendra chez moi. M Selgère a été nommé mon secrétaire ». Les réunions se tiendront à La Plane jusqu’à l’élection du 1er maire, Étienne Ponson, le 14 février 1790. Plus tard, il y aurait reçu, Tallien et Ysabeau, les Conventionnels, à l’occasion de réunions politiques… Il meurt, à 84 ans, le 20 novembre 1811 à La Plane, son fils Paul François Daniel en hérite. Il s’est marié en 1785 avec Sophie Baour.

chateau-Lescombes-arriere

Extrait du testament de Pierre Duret, fait le 6 novembre 1811 : « Je donne et lègue à François Baquey dit Panchille, mon homme d’affaire, sur mon bien de Laplane à Eysines et à son défaut s’il venait à mourir, à ses enfants, la somme de 1 000 livres, une fois payée, à titre de récompense pour ses soins et l’économie dans la gestion de mon dit bien de campagne et son attachement particulier pour moi. Je donne et lègue aux domestiques qui seront auprès de moi à l’époque de mon décès 150 livres à partager entre eux à part égale pour tous pour les récompenser des soins qu’ils m’auront donné. Je donne et lègue 360 livres aux pauvres dont 240 pour leur être attribué par le consistoire de l’église protestante à Bordeaux, 120 livres aux plus nécessiteux de la commune d’Eysines et ce à charge de mon exécuteur testamentaire de cette dernière distribution… »

L’abbé Baurein décrit le château de la Plane à la veille de la Révolution : « c’est un rectangle assez simple avec un semi étage. Il est flanqué de 4 tours capuchonnées et dominé par un pavillon central ouvrant sur un parterre (cour) à l’est et une garenne (parc) à l’Ouest ».

En 1812, le domaine a été vendu par adjudication en faveur de Jean Baptiste vicomte de Verthamon, puis à M. Reimonenq en 1825, à M. Jacques Pelissier, avocat, en 1830 et à M. Nicolas Malinau en 1843. À cette époque se sont réalisées d’importantes modifications : l’entrée du vestibule a adopté le style troubadour, de même que de grandes souches de cheminées néo-gothiques très à la mode alors. À la fin du XIXème siècle, a succédé la famille Yvert qui a fourni un maire à la commune de 1878 à 1881.

En 1908, des négociants en vin, les Berjal, sont devenus propriétaires et y font des transformations ; c’est l’époque du béton et un porche inesthétique est ajouté, mais supprimé aujourd’hui. En 1928, le château est en vente et il est question d’y transférer la mairie mais les habitants du bourg s’y opposent ! Il a été acquis par la famille Faure. Dans le magnifique parc du château, durant les années 1920-1930, se déroulait la fête de la société de gymnastique l’Ardente. Un grand bal champêtre suivait et à minuit l’embrasement électrique du parc et du château !

La ville d’Eysines l’acquiert en 1989. En 1993, Olivier Lescerce, urbaniste, visite le château avant sa réfection, et déclare que la plupart des intérieurs, boiseries, trumeaux et cheminées datent de la 1ère moitié du XIXème siècle. Le hall néo-gothique troubadour date lui aussi des années 1840 ; les boiseries sont en très mauvais état et ne pourront être conservées. Le reste du château est dans un état médiocre ; la toiture en tuiles canal est percée en plusieurs endroits.

En 1994 la restauration commence. Dans l’aile ouest, 2 grandes salles l’une pour les mariages et réceptions l’autre pour les expositions, ont remplacé un couloir étroit qui permettaient d’accéder à des pièces vétustes et exigus. Le hall d’entrée de 25 m² a été conservé. Il avait été marqué par une restauration néo-gothique au XIXème siècle.

Le 5 février 1995, inauguration du château et le 5 février 2000, inauguration du pigeonnier.

Texte extrait du blog de l’association Connaissance d’Eysines.

Son histoire commence avec le moyen âge. La Ville acquiert l’ensemble du domaine en 1989. Cet ensemble abrite aujourd’hui un parc paysager, un jardin potager pédagogique, un pigeonnier classé du 16e siècle, un musée des outils du maraîchage et un centre d’art contemporain. Espace le plus visité de la ville, Lescombes est devenu un rendez-vous incontournable à Eysines.

Chateau-Lescombes-carte-postale

A la fin de la guerre de cent ans, la paroisse d’Eysines est dévastée par les armées du Roi de France venues assiéger Bordeaux.
De l’ancien château désigné sous le nom de château de la Plane sous l’ancien Régime, ne subsiste que quelques éléments, notamment la porte gothique de la barbacane. Réutilisée à la fin du 12e siècle, elle orne désormais l’entrée du pigeonnier-puits.

Chateau-Lescombes-porte-gothique

 

Les propriétaires du château

1550 : Jean Dubernet, secrétaire du Roi fin du XVIème : Gratian de Mulet, écuyer
1631 : propriété du monastère des Feuillants
1720 : Benjamin Duret « bourgeois de Bordeaux et marchand des chartrons » puis Abraham et Pierre Duret (1er maire d’Eysines)
1811 : Jean Baptiste Verthamon
1825 : M. Reimonencq
1830 : famille Pélissier
1848 : famille Malineau
1878 : famille Yvert, (fournit un des Maires de la commune)
1908 : famille Berjal, négociants en vin
1928 : famille Faure

Le pigeonnier

 

Inscrit à l’inventaire des bâtiments historiques, le pigeonnier monumental du château Lescombes est unique en son genre. S’il ressemble aux colombiers contemporains de Daignac et de Saint-Pardon-de-Conques, sa particularité est d’avoir deux fonctions puisqu’il est bâti au-dessus du puits du château. Le bâtiment a d’abord une utilité agricole, les pigeons débarrassant les vignes des pucerons, chenilles et autres parasites. En 1794, Pierre Duret, le propriétaire, fait établir un moulin à bête dans le pigeonnier afin de l’utiliser pour moudre son grain. Au 19e siècle, les crises du phylloxéra et du mildiou font reculer la vigne, peu à peu remplacée par les jardins. Le pigeonnier est curieusement transformé en château d'eau.

Iconographie fonds privé Baron

Il accueille aujourd’hui le musée du maraîchage.

pigeonnierP1030219