La vie au Moyen-âge 

 

Déjà au Moyen-âge, les parasites s'attaquaient aux vignes ; aussi, en 1389, on emploie « des femmes pour détruire des petits vers appelés destrans qui dévastent les vignes. » Peut-être s'agit-il de l'altise ? À cette même époque, pour les vendanges, on paye une journée de femme 12 deniers soit 1,20 F or et une journée d'homme deux sous un denier, soit 4,10 F or. Enfin, une barrique de claret (vin rouge) vaut 185 F or. Dans la paroisse de Saint-Médard, on récoltait aussi du froment, du seigle et du millet comme on peut s'en rendre compte par les redevances payées à l'archevêché par les curés et appelés quartières.

En 1450, le 1er novembre, le Sire d'Orval, commandant un corps français contourna Bordeaux et vint camper le long de la Jalle entre Eysines et Bussaguet. La milice bordelaise attaqua le lendemain mais elle fut battue à plate couture : on appela cette journée « la male jornade », la mauvaise journée. Corbin dans son « Histoire de Pey Berland », ne donne pas d'autres indications : « le combat se livra au bord des marais de la Jalle ». Un éperon doré de chevalier a été trouvé au Poujeau de la Capère, tout au bord de la Jalle. Appartenait-il à une victime de ce combat ? Bordeaux fit sa soumission après cette défaite mais néanmoins rappela les Anglais en 1452. Ceux ci furent définitivement vaincus à Castillon le 17 juillet ; sur l'ordre de Charles VII, le comte de Clermont va soumettre le château de Castelnau tandis que Dunois a été chargé de réduire Blanquefort. Les deux forteresses se rendirent aux mêmes conditions que les autres villes de Guyenne, et Bordeaux capitula le 19 octobre. Saint-Médard dut être occupé en même temps mais aucun document n'en fait mention.

On ne trouve pas trace les guerres de religion. Il n’est resté de ces luttes que deux épigrammes lancées par les partisans de la réforme contre les prêtres et les moines : « Fegnan coum un can d’ermite » : Paresseux comme le chien d'un ermite ou encore : « Te rogamus audi nos, jou la biande et tu lous os » : Nous te supplions, écoute-nous, pour moi la viande, pour toi les os (Revue historique 1924).

La peste qui fit tant de ravages en Guyenne à la fin du XVIème siècle ne dut pas épargner Saint-Médard mais aucun renseignement n'est parvenu jusqu'à nous. On lit à ce sujet dans Montaigne (Essais, livre trois, chapitre 12) : « En dehors et au-dessus de ma maison je fus accueilli d'une peste véhémente. Généralement, chacun renonçait aux soins de la vie. Les raisins demeurèrent suspendus aux vignes le bien principal du pays, tous indifféremment se préparant et attendant la mort ce soir ou au lendemain d'un visage et d'une voix si effrayée qu'il semblait qu'ils eussent compromis à cette nécessité et que ce fut une condamnation universelle et inévitable... Quant au monde des environs, la centième partie des âmes ne se peut sauver... En ce lieu, mon meilleur revenu est annuel, ce que 100 hommes travaillaient pour moi chaume pour longtemps » (juin à décembre 1585). Dans le dernier semestre de 1585, plus de 14 000 personnes moururent à Bordeaux d'après Delurbe.

Et le 30 juillet de cette même année, Montaigne, alors maire de Bordeaux, écrit de Libourne aux Jurats « je m'approcherai mercredi le plus près de vous que je pourrai à Feuillas si le mal n'y est arrivé » (Feuillas est un quartier de Pessac). Il est vraisemblable que notre paroisse fut ravagée elle aussi par ce fléau. En effet, de nombreux actes passés en 1587 entre G. de Montaigne, seigneur de Gajac et plusieurs habitants indiquent que le pays quasi désert a été remis en culture à cette époque ; la plupart de ces actes se rapportant à des terres avoisinant Bos et Berlincamp font mention d'un champ désert, d'une vigne déserte. Le 17 septembre 1580, un arrêt du parlement de Bordeaux ordonne que des sentinelles soient mises au clocher pour découvrir les allans, passans et repassans de quelque religion qu'ils soient de plus grand nombre que de quatre à cheval : pour un ils sonneront les cloches pour quatre hommes à cheval et un coup par homme au-dessus de 4. La plus grande troupe devra sonner le tocsin pour assembler le peuple en armes pour les appréhender si faire se peut.

En 1605, fut mis en place une cloche portant l'inscription suivante : Fondue pour Saint- Médard-en Jalles 1605. Parrain noble Jehan James Destignols, marraine demoiselle Jeanne de

Brimau, femme de Mgr de Gaïac, conseiller du Roy. Cette cloche se fendit horizontalement puis se cassa en deux morceaux le jour de la Pentecôte, à la fin de la grand-messe le 28 mai 1871. Destignols était seigneur du Thil, J.de Brimau avait épousé Joseph de Montaigne.

En 1623, les châteaux forts qui avaient été élevés contre l'ennemi n'avaient plus aucune utilité depuis que le roi possédait seul une armée dans le royaume. D'autre part, Richelieu dans sa lutte contre la noblesse faisait démolir les forteresses féodales des puissants personnages toujours prêts à se révolter contre l'autorité du roi. Aucune considération ni supplique ne le faisait céder. La famille du Maréchal de la Force, un des derniers grands chefs protestants, possédait les châteaux de Fronsac, au confluent de l'Isle avec la Dordogne et de Caumont sur la rive gauche de la Garonne entre Marmande et le Mas d'Agenais. Leur démolition fut décidée et poussée activement malgré les démarches du Maréchal lui-même. M. Duffau, conseiller du Roi, avocat général au parlement, chargé de cette démolition pria les Jurats de Bordeaux « de lui trouver tout autant de manœuvres qu'il se pourra dans la banlieue et la petite prévôté. Le même jour, les Jurats écrivirent aux comtes des paroisses de Gradignan, Talence, Mérignac, Léognan, Illac, Boulac (sic), Eysines et autres paroisses pour se trouver à l'Hôtel de Ville. Le trois août, les Jurats envoyèrent à Caumont les manœuvres d'Eysines, Gradignan, Canéjan, Magudas, Gajac, conduits par les comtes. Ils ordonnèrent que les habitants desdits lieux les paieront 16 sols par jour, lesdits manœuvres se nourrissant. Un mois après, le château était démoli. » (Registre de la Jurade). Les Jurats de Bordeaux décidèrent d'emprunter 10 000 livres pour contribuer à cette démolition et Agen fournit 1 200 ouvriers à 10 sols par jour.

On n'a aucun renseignement sur les événements que la Fronde put provoquer à Saint-Médard. Il n'en est pas de même pour Salaunes dont les registres d'État-civil de l'année 1655 mentionnent « les gens de guerre ont enlevé les registres de l'État-civil depuis 1649 ». Douze habitants de Moulis « avaient été tués dans cette paroisse par des Irlandais et cavaliers du régiment de marche contre lesquels quatre à cinq cent paysans s'étaient soulevés » (État-civil de Moulis) à cause du pillage qu'on faisait chez eux. Ils succombèrent sous le nombre et « on envoya toutes les troupes bordelaises d'infanterie et de cavalerie pour se rafraîchir dans ledit Médoc où il leur fut fait 10 000 désordres tant sur leurs personnes, meubles et maisons que bestiaux dont leur pays est grandement peuplé. Ce qui nous fit grand bien en ville. Car je pense qu'il fut conduit plus de 10 000 têtes de bœufs, vaches et veaux sans comprendre les agneaux, chevaux et juments » (Récit de la fronde à Bordeaux par Cayrac). Saint-Médard échappa-t-il à ces pillages ? Au contraire, doit-on leur attribuer la disparition des minutes du notaire Johannet qui exerça de 1595 à 1638 et celle des actes de naissance, mariage et décès antérieurs à 1633 ? Aucun document ne renseigne à ce sujet.

Notes du docteur Arnaud Alcide Castaing sur la paroisse de Saint-Médard-en-Jalles sous l’Ancien Régime et sur la commune de la Révolution au XXème siècle, dossier familial, 1946, 270 pages, p.34-36.