La route de Bordeaux à Blanquefort

Le 6 août 1613 Pierre de Secondat, grand voyer de France donne l’ordre de remettre en état le chemin de Bordeaux à Blanquefort.

Il y a eu des plaintes émanant de marchands français, anglais et flamands et bourgeois de Bordeaux au sujet du mauvais passage de la Jalle et de ses abords du côté de Blanquefort « qui est le grand chemin de la poste de Bordeaux à Soulac établi de tous temps et ancienneté pour donner avis de l’entrée des navires dans la Gironde et empêcher la surprise ».

La Jalle fait son cours au travers du dit chemin par trois petits canaux qui par les débordements ordinaires l’inondent et rendent le passage impossible sur 450 toises (900 mètres.) Il y aura mise aux enchères le 19 septembre des travaux ci-après :

1 Du côté de Bordeaux, près le moulin de la Dame de Blanquefort (Plassan) réfection des chaussées sur 20 toises à 4 toises de large.
2 Un pont avec deux arches de 9 pieds de diamètre, pilier de 5 pieds d’épaisseur.
3 Au-delà, tirant du moulin, chaussée sur 40 toises.
4 Au-devant du moulin, un pont deux arceaux.
5 Vers un autre cours d’eau, chaussée sur 145 toises.
6 Un pont à deux arches comme ci-dessus.
7 Vers Blanquefort, chaussée sur 52 toises.
8 Un nouveau pont identique.
9 Chaussée sur 91 toises.
10 Un nouveau pont.
11 Vers le dernier moulin du côté du bourg de Blanquefort, chaussée sur 100 toises.
12 Un pont à quatre arches derrière le moulin le plus proche du bourg.13 Raccordement de 140 toises avec pavage.

Soit au total 588 toises, ce qui correspond à 1 146 mètres dont 120 au sud de Plassan et 280 au nord de la Jalle de Blanquefort. (Archives départementales de la Gironde côte C 4240)

En 1670 un acte signé Jacques Ponson maçon cite le « grand chemin du moulin de Plassan au bourg de Blanquefort ». (ADG 3 E 28194)

14 janvier 1703. Réunion capitulaire à l’issue de la grand’messe à Blanquefort.

« Les chemins, ponts et chaussées qui sont en la dite paroisse, [de]puis le haut du pavé vis-à-vis la maison de Mme de Pontac jusques et y compris le moulin de Plassan joignant la paroisse d’Eysines étant dans la dernière dégradation depuis plusieurs années et notamment depuis l’inondation de la présente année entelle manière que le chemin est impraticable et rend la communication difficile du Médoc et Blanquefort avec Bordeaux veulent que pour la construction de ponts, rétablissement des chaussées et chemins il soit pris sur les habitants taillables de la paroisse la part et portion qu’ils devront contribuer avec les autres paroisses qui ont l’usage du dit chemin sur le pied présent de la taille qu’ils paient au roi ». (ADG 3 E 28218)

8 août 1712.Le chemin royal de Bordeaux à Blanquefort et autres endroits est en très mauvais état et s’est rendu impraticable, soit parce que les eaux d’une très grande étendue l’inondent dans toutes les saisons de l’année, soit parce que le pavé du chemin qui est le long des possessions de la maison noble du Luc est tout rompu et hors de place et est plein de précipices qui le rendent inaccessible. Les laboureurs, bouviers et manœuvres des paroisses intéressées (de Bordeaux à Macau) devront fournir des corvées pour sa réparation. (ADG C 4240)

Mémoire concernant la réparation du « chemin de l’eau » de Blanquefort. Non daté, peut-être 1730. Après que la Jalle a passé sous le pont du Taillan, elle se divise en deux branches entre lesquelles se trouvent les palus ou marais de Blanquefort et de Bruges.

Le chemin qui traverse la palu de Blanquefort et qu’on nomme communément le chemin de l’eau était anciennement en très bon état au moyen de trois ponts dont les ruines subsistent et dont on croit les fondements très solides. C’est sous ces trois ponts que s’écoulaient toutes les eaux répandues dans le marais pour se distribuer au-dessous du chemin dans les marais de Blanquefort et de Bruges par des fossés destinés à cet effet.

Le peu de soins qu’on a eu de l’entretien de ces ponts a causé leur disparition. Leurs ruines ont empêché le cours ordinaire des eaux. Les fossés destinés à les recevoir se sont comblés. Enfin, le chemin sert aujourd’hui à l’écoulement de ces mêmes eaux dont la desserte (?) principale se trouve dans un fossé près du moulin appelé du Bouha (du Goua).

Il y a de l’eau plus ou moins en tous les temps de l’année dans ce chemin depuis avant le moulin appelé de Plassan jusqu’à celui du Bouha, souvent même dans l’hiver on ne saurait y passer à cheval ou en voiture sans un risque évident d’y périr.

Il arrive fréquemment que les bœufs et les chevaux se morfondent par le long temps qu’ils sont obligés de marcher dans cette eau, encore en sueur par le voyage ; de là proviennent des maladies et des pertes dans les bestiaux ; d’ailleurs combien de nourrices de la paroisse de Blanquefort, pour épargner un sol pour le passage par le bateau risquent en passant dans l’eau de se rendre malades et de perdre leurs nourrissons. La conséquence de ces accidents intéresse le public en général.

À ces observations on ajoute que le chemin de Blanquefort est le chemin naturel de tout le Médoc et qu’on se détourne considérablement en passant par le pont du Taillan.

Autant que l’inspection des lieux permet d’en juger, on croit que pour le parfait rétablissement de ce chemin, il suffirait :

1 De faire rendre les eaux d’un petit ruisseau qui est un peu avant le moulin de Plassan dans le bassin au-dessous de ce moulin par le même fossé qui bordera du côté du chemin.
2 De faire un pont au moulin de Plassan semblable à celui qui est au moulin du Bouha.
3 Refaire les trois petits ponts dont les fondements subsistent.
4 Faire nettoyer par les propriétaires les anciens fossés qui servaient à conduire les eaux à ces ponts et à les recevoir ensuite.
5 Faire rétablir les deux grands fossés qui doivent border le chemin dans toute son étendue.
6 Enfin faire porter du sable qui est dans le voisinage pour élever un peu ce même chemin qui est un des plus nécessaires et des plus usités de la généralité.

On estime que le bien qui résulterait de cette réparation serait infiniment au-dessus de la dépense qu’il faudrait y faire pour laquelle, tant la paroisse de Blanquefort que les voisines et celles du Médoc qui y trouveront leurs avantages pourraient contribuer à proportion des fonds afin que les manœuvres et bouviers qui y seraient employés fussent payés à un prix modique de leurs journées, on pourrait même obliger tous les bouviers de ces quartiers de prendre à Saint-Seurin et porter sur les lieux quatre à cinq pierres de taille ou du moellon à proportion lorsqu’ils reviennent à vide ; la quantité qu’il en passe journellement aurait bientôt apporté tous les matériaux nécessaires. Le sable se trouve sur les lieux du côté d’Eysines, ce qui rendra les opérations beaucoup moins coûteuses.

Quant au passage par bateau qui appartient à M. Le duc de Duras, cet objet ne saurait en aucune façon balancer l’utilité de la réparation proposée. En premier lieu il ne saurait y passer aucune espèce de voiture ni même de chevaux. En second lieu, les personnes à pied abrégeant d’environ demi-lieue en passant par ce bateau la réparation du chemin de l’eau ne saurait guère diminuer le nombre de personnes qui pour un sol peuvent autant raccourcir leur chemin. Enfin, la ferme de ce passage est si peu considérable qu’on assure dans le pays que les fermiers (gens attentifs à tout ce qui concerne leur profit) n’en ont pendant plusieurs années retiré aucun émolument. Ils ont dans la suite affermé le droit de passage 50 livres par année. Enfin, successivement cette ferme a été portée à 300 livres qui est le prix d’à présent.

De cette considération peut-être ce modique objet pour la ferme de M. le duc de Duras que le sieur Tanaïs a pris en dernier lieu à 21 200 livres par année, d’ailleurs comme il a été observé ci-dessus la réparation proposée ne peut porter que peu ou point de préjudice au produit de ce passage. Il y a mieux : l’intérêt de M. le Duc de Duras se trouve dans cette réparation puisqu’elle bonifierait beaucoup sa paroisse de Blanquefort, il y profitera ou ses fermiers à proportion des fonds immenses qu’il y possède et des bestiaux qui lui sont nécessaires pour les charrois. Il est même naturel de penser que la ferme de sa terre sera portée plus haut dès que le chemin de la jalle sera raccommodé et les voitures se pourront faire en tous temps sans risque. »

Le moulin du Gua se trouvait à l’angle nord-est du parc de Majollan. (ADG C 1862)

10 mai 1750. Toisé des fossés et canaux à creuser dans le marais de Blanquefort pour former la chaussée à élever pour assurer la communication de Bordeaux avec le Médoc.

- Fossés le long de la chaussée longueur ensemble 1 160 toises, largeur 5 toises, 2 pieds, 9 pouces, profondeur xxxx

- Canal depuis la partie gauche du chemin jusqu’à la jalle d’Audran, longueur 500 toises.

- Canal qui doit servir à la décharge de l’eau du moulin de Plassan longueur 157 toises.

22 juin 1750. Mise en adjudication des travaux à effectuer pour « élever et former une chaussée sur le travers du marais de Blanquefort… et pour l’écoulement d’une partie des eaux depuis l’ancien chemin jusqu’à la jalle d’Andran proche du château de Blanquefort ». La chaussée fera 580 toises de long, 7 toises et 2 pieds de large avec encaissement de gravier, fossé de chaque côté. Un canal de 500 toises depuis l’ancien chemin jusqu’à la jalle d’Audran, un autre de 157 toises pour la décharge des eaux du moulin de Plassan. (ADG C 1858 et C 1857)

17 août 1750 : Adjudication à Pierre Bellard. (ADG C 1858)

5 septembre 1751. Le subdélégué au département de l’intendance de Bordeaux ordonne que les bouviers des paroisses de Caudéran, le Bouscat, Bruges, Eysines et le Taillan voitureront du lieu appelé le Canton de la Rode à pied d’œuvre du pont qui doit être construit sur la jalle de Plassan 6 000 pieds cubes de pierre de taille entre le 9 septembre et la fin du mois. (ADG C 1853)

10 janvier 1752. Ordonnance de Tourny.

Les transports prescrits n’ont pas été réalisés. L’ordre est renouvelé. De plus les bouviers devront effectuer un second voyage en prenant la pierre aux Chartrons. Des cavaliers de la maréchaussée sont chargés de surveiller l’exécution et de dresser procès-verbal. (ADG  C 1853) 

13 janvier 1753.Pierre Dosque, meunier de Canteret, reçoit 63 livres d’indemnités pour chômage à cause de la construction d’un pont sur la jalle ayant entraîné l’arrêt des eaux. (ADG C 2019) 

31 août 1753.La chaussée, les fossés et les ponts sont construits. Un canal a été creusé pour permettre l’évacuation des eaux. Ces travaux dessèchent le marais et l’ont rendu plus productif. Le canal et les fossés sont déjà considérablement encombrés. Comme les propriétaires des fonds éloignés en tirent avantage, il semble normal qu’ils contribuent à l’entretien. Il est donc demandé l’établissement d’une communauté du marais pour l’entretien des jalles et des fossés. (ADG C 1853)

27 avril 1761.Une ordonnance du 9 juillet 1760 imposait aux « manants » de Blanquefort de travailler à la réfection du chemin traversant les marais de Blanquefort. Les travaux ont été entrepris, un pont a été construit. Mais de nombreux bouviers ont refusé cette corvée, le pont est à nouveau ruiné, le chemin impraticable. (ADG C 4240)

 

Cartes et plans.  

Très joli plan montrant la Jalle, Plassan et le « chemin neuf de Blanquefort ». AMB. Fonds Delpit. Mic 100/7. Carton 47. N° 6. Plans des routes et chemins envoyés à M. Trudaine. Chaussée de Blanquefort. (ADG  C 1851. 1751-1752).

Trudaine-couleurs

 

Texte et recherches de Michel Baron.