Château Maurian  

Historique

Édifices antérieurs : de l'ancien château dont Édouard Guillon rapporte la description par la tradition locale : « château avec des fossés, une cour, des tourelles », il ne reste ni traces, ni représentations. L'érudit local, Guy Dabadie, écrit, dans son ouvrage sur Blanquefort, que : « Le château fut entièrement rasé et reconstruit il y a un siècle, sur les anciennes fondations ».

Origines du domaine : bien qu’É. Guillon fasse remonter l'histoire des seigneurs de Maurian depuis le XIVe siècle, les sources contrôlables, faisant mention d'un seigneur de Maurian à Blanquefort, ne datent que de 1709. En mars 1709, en effet, Jean Besse seigneur de Maurian, chevalier conseiller du Roi, vend une terre à Audat, paroisse de Blanquefort (AD.33 Fonds Ferradou. 6193).

Dans un acte de 1739, les Besse père et fils sont dits « seigneurs de la maison noble de Morian », ils vendent à Dumas un bourdieu situé à Blanquefort et au Taillan. (AD.33 Fonds Ferradou. 27358).

Au début de la période révolutionnaire, Jean-Jacques de Besse divorce d'avec Élisabeth Andrieux, il abandonne le château et émigre. Le château devient alors bien national.

Le 19 prairial an IV, Élisabeth Andrieux rachète le château (M.B.C. « Vente des Biens Nationaux »).

Guy Dabadie affirme que Jean-Jacques de Maurian revint à Blanquefort sous l’Empire et y mourut, « dans le cimetière de la commune, un caveau porte ce nom. »

Le lieu-dit « Morian » figure sur la carte de Belleyme à l’est du château de Terrefort. La carte ne fait pas mention d’un château, mais plutôt d’un groupe d’habitations. Les relevés cadastraux de 1806 montrent un ensemble de bâtiments délimitant une cour. Le logis ferme cette cour au nord-ouest. La disposition reste la même sur le cadastre de 1843 ; la configuration du corps de logis est différente, des décrochements existent sur la façade ouest. Le cadastre récent présente la demeure isolée au fond d’un parc. Les contours de la construction sont réguliers et mettent en évidence la symétrie dans l’organisation de la façade ouest. Les bâtiments d’exploitation ont disparu pour la plupart, ce qu’il en reste vers l’ouest a été réaffecté.

maurian-plans-cadastrauxPlans cadastraux de 1806, 1843 et 1983 

Description

Situation et composition : le château Maurian est sur une colline qui domine à l'ouest le paysage plat des marais et des palus. Des bâtiments d'exploitation qui bordaient avec le château une vaste cour, il ne reste rien. Le château actuel est un corps de logis massif, flanqué par des ailes basses et courtes.

Matériaux et leur mise en œuvre : pierres de taille pour l'ensemble du château, ardoises pour la toiture.

A - Parti général

Le corps de logis principal présente un plan rectangulaire. Sur les petits côtés, deux ailes de plan carré sont saillantes sur la façade antérieure.

B - Elévations extérieures

Façade antérieure : Le corps principal a deux travées de fenêtres de part et d'autre d'une travée centrale en léger ressaut. Les travées sont séparées par des chaînes à refends, plus larges aux angles de la demeure. La division horizontale est assurée par une moulure continue plus marquée sur la travée centrale. Elle sépare les deux premiers niveaux. Les fenêtres sont de forme rectangulaire, encadrées par un chambranle mouluré. La partie inférieure est soulignée par un appui soutenu par deux petites consoles entre lesquelles une table est en faible relief. L'entrée se fait par une large porte-fenêtre inscrite dans un arc outrepassé sur la travée centrale qui, en sa partie supérieure, est surmontée de deux boules d'amortissement. Trois lucarnes, couronnées de frontons triangulaires, éclairent l'étage de comble. Les ailes saillantes dê1imitent une terrasse étroite accessible par trois degrés. Percées d'une fenêtre, elles présentent le même décor de chaînes à refends que le bâtiment principal. Une balustrade masquant la toiture, règne au dessus d'une forte corniche. Un décrochement aux angles de chacune des ailes est occupé par un petit perron formé par quelques degrés menant à une porte.

Façade postérieure : Orientée vers l'ouest, cette façade est identique à celle du corps principal à l'est.

Combles et couvertures : trois lucarnes sur chaque façade donnent la lumière au comble aménagé sous un toit à deux versants en ardoises. Quatre cheminées, hautes et plates en pierres, dominent les croupes et le long pan postérieur de la toiture.

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Note de synthèse : des origines lointaines du château Maurian, il ne subsiste que le nom, conservé pour une demeure construite à la fin du XIXe siècle. Il n’est pas certain que la construction actuelle soit sur l'emplacement des édifices antérieurs. La situation du domaine a été beaucoup modifiée par les acquisitions de la zone industrielle vers l'est, et le développement des lotissements vers le nord surtout. L'architecte, qui a travaillé pour la famille Tastet vers 1880, a imaginé, ou a répondu à la commande d'une demeure, que la rigueur dans l'animation des façades et dans l'organisation des corps de bâtiments, met à la limite de la sévérité et de la massivité.

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 Source : Châteaux et maisons de campagne de Blanquefort, mémoire de maitrise de Bertrand Charneau, Université de Bordeaux III, 1984.

Autres sources 

L’abbé Baurein parle longuement de ce petit château, situé au nord du bourg de Blanquefort, et s'appesantit surtout sur son nom de Maurian, qu'il attribue à des Maures fondateurs. « Cette maison noble, dit-il, paraît être d'une haute antiquité ; sa dénomination seule, qui dérive du mot Maure, suffirait pour le prouver. »

On l'appelait la Tour de Maurian, et c'était un simple fief qui n'eut jamais droit de justice dans la paroisse ; mais son origine ne remonte pas au temps des invasions sarrazines, et l'on ne retrouve de ses seigneurs qu'à partir du XIVe siècle.

En 1360, Bertrand de Noaillan était seigneur de Maurian.

En 1411, Bertrand-Andron se qualifiait « seigneur de la terre de Maurian, » et en 1425, le chevalier Jean Andron, probablement son fils, prenait le même titre.

Après la conquête française, Jean Andron de Bourg est qualifié seigneur de Maurian dans un titre de 1482, et Jean Andron, écuyer, lui succéda vers 1501.

Le château passa ensuite dans la famille de Lansac, qui était probablement la même que celle de Bourg, et Andron de Lansac en était seigneur en 1539.

Cette seigneurie passa, pendant les guerres de religion, dans la famille de Fleix, et Jeanne de Fleix, dame de Maurian, épousa Nicolas de Bloys, écuyer, dont elle eut François de Bloys, qui était seigneur de Maurian en 1589. Jean de Bloys, qui en hérita, la possédait en 1606, puis elle passa dans la famille de Besse, où elle resta jusqu'à la Révolution.

En 1789, Jean-Jacques de Besse, seigneur de Maurian, comparut à l'assemblée de la noblesse bordelaise, ainsi que son frère, le chevalier de Maurian, puis ils disparurent dans la tourmente révolutionnaire. L'ex-seigneur de Maurian émigra, laissant à Bordeaux Élisabeth Andrieux, son épouse, qui divorça d’avec lui et abandonna le château ; il fut saisi par l'État et mis en vente comme propriété nationale.

La tradition locale raconte que Maurian était un joli château avec des fossés, une cour et des tourelles ; cependant le rapport des experts chargés de l’estimer au moment de la vente n’en donne pas une semblable opinion. « Ladite maison, porte ce rapport, consiste en un vestibule d’entrée, trois chambres bouges, cabinet de toilette, cuisine, souillarde, chambre de paysans, écurie, cuvier, chai, grange, volières, bûcher et un colombier en dehors de la cour ; le tout de vieilles constructions susceptibles de réparations considérables. » La maison et la propriété furent mis en vente, et le tout fut acheté, le 19 prairial an IV de la République, par la citoyenne Élisabeth Andrieux, épouse divorcée du sieur Maurian, qui le paya 44.040 F. Lorsque les émigrés rentrèrent, M. de Maurian revint mourir dans la propriété, qui passa ensuite à sa fille, devenue Mme Guille. Ce fut elle qui la vendit, en 1823, à M. Dégrange-Tauzin, dont elle est passée par transmission, à son fils, président à la Cour impériale, et propriétaire actuel. Maurian est aujourd’hui une petite maison basse qui ne mérite pas le nom de château ; elle est sur la limite des marais et des graves, et a donné son nom à un village de Blanquefort. Devant est une vaste cour plantée d'arbres et entourée de murailles, au Sud s'étend une garenne délicieuse rafraîchie par un ruisseau ; à l'Ouest le vignoble, qui est sur des graves, et qui récolte 20 à 25 tonneaux de bons vins .

Source : Édouard Guillon.

D'après l'abbé Baurein, le nom de ce château provient de ce que les Maures, lors de leurs grandes conquêtes, s'y établirent (comme, du reste, en d'autres points du territoire de notre région) et l'abandonnèrent après la bataille de Poitiers (732). On l'appelait au Moyen-âge « la tour de Maurian ». À cette époque, le seigneur de ce château était un vassal du seigneur de Blanquefort. C'était un très joli bâtiment, avec une cour intérieure et des tourelles, le tout entouré par un fossé. Il fut entièrement rasé à une époque indéterminée et reconstruit il y a environ un siècle, sur les anciennes fondations. Nous ne possédons pas de renseignements sur Maurian depuis le départ des Arabes jusqu'en 1360 où le maître des lieux était Bertrand de Noailhan, seigneur de Maurian, de la Mothe de Ludon et de Cantenac. Il devait mourir dans les quelques années qui suivirent, car un acte de 1380 parle de sa femme Assalide de Ségur, dame de Cantenac, veuve de Bertrand de Noailhan, etc.

Ses propriétaires successifs furent alors : en 1411, Bertrand Andron de Maurian ; 1425, Jean Andron, fils du précédent ; 1482, Jean Andron de Bourg ; 1501, Jean Andron, écuyer ; 1539, Andron de Lansac ; 1561, Jean de Loste, écuyer, seigneur de Cercins, du Temple, de Planquetorte et de Maurian. Puis, il devint la propriété de la famille de Fleix en la personne de Jeanne de Fleix, dame de Maurian, qui se maria avec Nicolas de Bloys. En 1589, leur fils François de Bloys hérita du château et, en 1606, ce fut le tour de Jean de Bloys. Puis la famille de Besse en devint maîtresse. En 1789, le château était habité par deux frères : Jean-Jacques de Maurian et le chevalier de Maurian, porte-drapeau du régiment patriotique de Blanquefort. Le 16 mai 1790, le chevalier se présenta à la maison curiale de Blanquefort où étaient assemblés les officiers municipaux. Il prit la parole et dit « qu'ignorant le jour où se devait prêter le serment patriotique par ledit régiment entre les mains des officiers municipaux, il venait en témoigner son regret et demandait à être reçu à prêter ledit serment, ce qui lui a été accordé. » Le 14 novembre 1790 ; il fut nommé premier scrutateur lors de l'élection partielle de la municipalité. Le 10 avril 1791, il fut élu lieutenant-colonel du régiment patriotique par 246 voix sur 264 suffrages émis.

Le 5 juillet 1792, devant la menace, Jean-Jacques de Maurian émigra avec la complicité de la municipalité qui lui délivra le passeport suivant : « La Nation, la Loy et le Roy. Département de la Gironde, District de Bordeaux, Municipalité de Blanquefort. Laisser passer Jean-Jacques Maurian, français, domicilié dans la municipalité de Blanquefort, district de Bordeaux, cultivateur, âgé de 45 ans, taille 5 pieds 4 pouces. Cheveux et sourcils châtain brun, yeux gris, nez gros, bouche grande, front évasé, visage rond, menton rond. Allant aux eaux de Cauterets en Bigorre. Et prêtez-lui aide et assistance en cas de besoin. » Il signa lui-même ce passeport sur le registre des délibérations, de Maurian, et non pas Maurian tout court. Il laissait à Bordeaux sa femme Élisabeth Andrieu qui divorça peu après. Son château fut saisi par l'Etat et déclaré propriété nationale. Mis en vente, il fut acheté par Elisabeth Andrieu moyennant 44 040 francs, le 19 prairial an IV, et le domaine pour 1 750 francs, le 5 ventôse an VI. J.J. de Maurian revint à Blanquefort sous l'Empire et acheta une partie du Domaine de Terrefort (1806) où il mourut. Il fut enterré au cimetière de Blanquefort où son caveau existe toujours. C'est sa fille, Mme Guille, qui hérita du château Maurian. Celui-ci fut vendu en 1823 à M. Desgrange-Tauzin, qui le laissa ensuite à son fils, président de cour sous le Second Empire. Ce dernier était, par sa mère, neveu de M. de Martignac.  

Source : Guy Dabadie.

« Nous y trouvons une plantation sur sol graveleux dont le vin rouge, assez moyen, laissait au palais un léger goût de terroir, qui s’estompait par la suite, dû au sous-sol de l’alios. »

Source : Raymond Valet.

Le château actuel est le dernier château construit à Blanquefort vers 1870 pour M. Gustave Tastet, par les frères Pellot, entrepreneurs de maçonnerie à Blanquefort. De cette propriété d’agrément de M. et Mme Gustave Tastet, la partie haute des vignes fut acheté pour le Collège agricole féminin et du côté de Saumos où un vin de graves était très moyen avec un parc à vaches donnant peu de rapport, la parcelle a été absorbée par la zone industrielle. Ces généreux donateurs de la commune sont honorés par une rue portant leur nom. Une rubrique leur est réservée dans la série des personnalités de la commune (chapitre : population).

Durant la Seconde Guerre mondiale, une partie du château est réquisitionnée au service de la poudrerie de Saint-Médard-en-Jalles, pour loger les réfugiés. Ce château n’était pas prêt pour accueillir une formation allemande en 1940 : il n’y avait pas d’eau, ni pour la cuisine, ni pour les lavabos ; les toilettes étaient à faire ; l’eau du puits était non potable. Les travaux sont donc engagés. La municipalité demande un devis le 20 mars 1940 pour la pose de 3 poteaux électriques ; ce logement était-il aussi sans électricité ? La solution proposée par la mairie est de faire une canalisation d’eau d’environ 250 m, de la route au bassin, et d’aménager des latrines portatives, en urgence. Dans le parc du château, en 1944, les troupes allemandes firent édifier un blockhaus qui avait une situation stratégique car il contrôlait les routes vers Parempuyre et les marais. À la Libération, le groupe FFI « Albert » investit, de façon symbolique, les lieux occupés par les Allemands, sans doute aussi pour neutraliser les locaux et récupérer les armes. Ce groupe de FFI deviendra le 123ème RI, 1er Bataillon, 4ème Compagnie. Le château fut acquis par la commune en 1976 et abrite jusqu’en 2018 le CESI (Centre d’Etudes Supérieures Industrielles). Le blockhaus de Maurian est le seul à avoir été « recyclé » pour la vie citoyenne : il sert en effet de salle de répétition pour les groupes musicaux locaux, l’épaisseur des murs contient les décibels sonores ! Au nord, le socle d’un kiosque d’agrément est resté en souvenir d’un certain style de vie. Une résidence, Suzanne Lacorre, pour les jeunes, vient d’être aménagée dans une partie du parc de Maurian.

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Bibliographie du château Maurian

- Archives municipales,
- Edouard Guillon, Les châteaux historiques et viticoles de la Gironde avec la description des communes, la nature de leurs vins et la désignation des principaux crus par Edouard Guillon, 1867, chez Coderc, Degréteau et Poujol, Maison Lafargue, 28 rue du Pas Saint-Georges, Bordeaux, p.33-34,
- Guy Dabadie, Blanquefort et sa région à travers les siècles, Imprimerie Samie, Bordeaux, 1952, p. 67-69,
- Guy Dabadie, Histoire du Médoc, imprimerie Samie, Bordeaux, 1954, p. 106-108,
- Raymond Valet, Feuillets d’une mémoire, G.A.H.BLE, 1984, p.6 et 43,
- Blanquefort, rues et lieux-dits, Publications du G.A.H.BLE, 1996, p.81-82,
- Catherine Bret-Lépine et Henri Bret, Années sombres à Blanquefort et dans ses environs 1939-1945, Publications du G.A.H.BLE, 2009, p.241.

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                                         Dépendance du château Maurian