Je me souviens

Je me souviens des queues d’ail que nous fumions en cachette dans les cabanes des jardins de Maurian, et afin de faire passer l’odeur nous allions manger les fraises de tante Alice (famille Fort).

Je me souviens de nos camps d’Indiens que nous faisions dans le bois du collège d’art ménager (actuellement, emplacement du complexe « le Maurian ») et de cet immense plaqueminier chargé de fruits.

Je me souviens des pêches de brochettons que nous faisions au tramail dans ce ruisseau de la Rivière, le Cournalet, lequel longeait la porcherie de mon oncle (actuellement Castelvin).

Je me souviens des pêches aux anguilles (toc), les soirs orageux, dans les fossés du vieux-château ou bien à Maurian dans la propriété du château Tujean. Anecdote : un jour, mon cousin qui est sourd et muet, n’a pas entendu les vaches qui nous chargeaient.

Je me souviens des vendanges à Maurian lorsque les uns et les autres s’entraidaient afin d’aller plus vite et de se retrouver pour le repas des vendanges.

Je me souviens des jeux d’enfants que nous faisions : quatre coins, chat perché, ronde du mouchoir, au croisement de la rue de Saint-Haon de Maurian et belle vue, c’était l’époque où nous ne risquions rien.

Je me souviens du jour où j’ai passé mon certificat d’études et de la joie de mon père lorsque mon n om a été prononcé.

Je me souviens de la découverte que nous avions faite dans le blockhaus de Maurian et qui nous fut supprimée par nos parents ; c’était des casiers de vins vieux, cachés par je ne sais qui ou oubliés après la guerre.

Je me souviens de toutes ces petites épiceries qu’il y avait dans les villages ; à Maurian, il y en avait deux.

Je me souviens des cérémonies de commémoration des armistices, et en particulier le 11 novembre où pratiquement toutes les classes des écoles étaient présentes ainsi qu’un détachement militaire.

Je me souviens des mouvements d’ensemble que nous faisait pratiquer notre professeur physique pour la fête des écoles. Nous étions en blanc avec des petits foulards rouges et bleus à chaque bras.

Je me souviens des glissades que nous faisions sur le fossé gelé qui longeait le cimetière.

Je me souviens de mon service militaire au camp de Tanaïs ; ma classe 66/2B a été la dernière dans ce lieu.

Je me souviens que les jeunes Blanquefortais désirant se rendre à Cachac se retrouvaient bien souvent dans le lavoir de Maurian.

Je me souviens d’un seul après-midi de vêpres parce que le curé m’avait pilé sur les doigts.

Je me souviens d’une personne qui impressionnait par son physique, les enfants l’appelaient la sorcière de Maurian.

Je me souviens avoir fait des fusées avec la poudre récupérée sur les bords de la Jalle, elle arrivait de la poudrerie de Saint-Médard.

Je me souviens que pour mardi-gras nous allions porter des violettes sauvages à des personnes seules ou malades.

Je me souviens de mon apprentissage de menuisier chez mon cousin Maurice, un des artisans ayant contribué à l’érection de la cité Saturne.

Je me souviens que le samedi soir des jeunes se retrouvaient autour d’un juke-box dans une pièce du bar Gégé qu’il nous prêtait bien gentiment pour écouter de la musique.

Je me souviens que nous allions nous baigner dans l’eau des quatre-ponts qui à l’époque était très propre.

Je me souviens des tuailles du cochon chez mon oncle au village de la Rivière.

Je me souviens de deux personnes qui avaient l’une une mule, l’autre un cheval et qui se disputaient le pacage d’un champ à Maurian.

Je me souviens des pastilles de camphre que ma mère m’attachait autour du cou pour me préserver de l’épidémie de poliomyélite car trois enfants de la commune l’avaient contractée.

Je me souviens du matin où la radio annonçait la mort du président J. Kennedy qui plongea tout le monde dans une grande tristesse.

Je me souviens de mai 68 où la plupart des jeunes de mon âge entre 18 et 22 ans se retrouvaient chez Gégé pour partir manifester à Bordeaux, tout en évitant les barrages barrière du Médoc et de Tivoli.

Je me souviens du 10 mai 1981, mon père est venu boire le champagne chez nous, tout heureux du résultat des élections.

Je me souviens de l’époque où les Russes avaient installé des missiles à Cuba, ce qui avait failli déclencher la 3ème Guerre mondiale, tous les gens tremblaient.

Je me souviens du cinéma chez Badez où nous allions les plus petits sous la responsabilité des grands qui devaient nous ramener à l’heure indiquée par les parents.

Je me souviens de ce coiffeur qui coupa un petit bout d’oreille à un camarade, il a fallu que ma grand-mère me reconduise à la maison, il n’était plus question d’attendre dans le salon du coupeur d’oreille.

Je me souviens de l’époque où les gens pouvaient partir de chez eux en laissant la porte ouverte, sans avoir peur des cambrioleurs.

Je me souviens de l’arrivée des pieds-noirs d’Algérie à Maurian, et l’abus de certains métropolitains pour ces gens démunis.

Je me souviens du verger du lycée agricole qui fut visité par les enfants de Maurian, ce que la gendarmerie avait découvert très vite, les noyaux des cerises remontaient jusqu’au village.

Je me souviens des disputes entre le président du football et le maire qui étaient d’opinions politiques différentes.

Je me souviens de l’achat du poste de télévision de mes parents et de la salle à manger devenue salle de cinéma du quartier.

Je me souviens de cette troupe de cosaques venus faire leur exhibition sur le terrain qui servait de stade de football.

Jean-Pierre Jouglet.