Le premier cimetière

À Blanquefort, l'ancien cimetière (du latin coemeterium, lieu de repos, lui-même issu du grec) se trouvait, selon l'usage, au pied de l'église Saint-Martin, en plein centre du bourg ; il fut officiellement désaffecté en 1809 mais les inhumations ne cessèrent qu'en 1853.

Le 9 ventôse an 12 (29 février 1804) le conseil municipal prit plusieurs mesures : « un changement de cimetière était décidé par mesure de salubrité et aussi pour permettre un élargissement de l'église contre laquelle il était accolé ».

Des travaux dans le cimetière de la commune eurent lieu tout au long du XIXe siècle : « les municipalités successives de MM. Delisse, de Saint-Quentin (1862), Amédé Tastet (1868) entreprirent des travaux importants :
          
Arrachage des platanes du cimetière, pose du portail de celui-ci (1859),
           Construction d'un mur l'entourant (1863),
           Agrandissement du cimetière (1862). »

 NB : Un autre cimetière avait été établi à Caychac, proche de la chapelle Saint-Ahon désaffectée dès avant la Révolution.

                                                              Cadastre de 1806

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La place de l’église

« Le cimetière désaffecté a permis la création d’une place publique destinée aux marchés hebdomadaires et aux fêtes populaires ».

C'est là que se trouvait un arrêt de la ligne d'omnibus à chevaux créée en 1864 entre Blanquefort et Bordeaux.

En 1950, des fouilles furent effectuées sur la place de l’église, ainsi qu’en témoignent ces extraits de lettres familiales : « 18 décembre 1950. Chère maman ... il paraît qu'on a coupé les arbres de l'église à Blanquefort et Yann m'a dit qu'on avait trouvé de l'or et de l'argent. Henri. » ou encore : « Blanquefort. 19 décembre 1950 ... Les cantonniers ont arraché tous les arbres qui sont sur la place; ils ont trouvé des tombeaux. Roger »

Elle fut aménagée en parc de stationnement pour les voitures en 1969 ; les importants travaux de terrassement entraînèrent la mise au jour de plusieurs sépultures anciennes, sarcophages en pierre ou cercueils en bois et ossements qui ne furent pas épargnés, ce qui suscita l'indignation de nombreux Blanquefortais.

À l'initiative de quelques uns d'entre eux, futurs Amis du Vieux Blanquefort, les restes dégagés furent recueillis par des employés municipaux et enterrés dans le nouveau cimetière. En 1976, à l'occasion de l'aménagement de la pharmacie de la place de l’église, d'autres sépultures furent dégagées sous la maison réhabilitée ; il en fut de même en 1982 lors des travaux de pose du tout-à-l'égout dans la rue longeant cette place, ce qui tendrait à prouver que le cimetière ancien était beaucoup plus vaste que l'emprise actuelle de la place et de la rue.

Diagnostic archéologique

Le passé refait surface : dans le cadre du futur aménagement de la place de l'église par la CUB et la mairie, Vanessa Elizagoyen, archéologue à l'Inrap, a effectué un diagnostic archéologique en compagnie d'une petite équipe d'agents spécialisés. L'opération avait pour but d'évaluer et de caractériser le potentiel archéologique de la zone menacée par les travaux, c'est-à-dire de collecter et d'analyser les données servant à reconstituer l'histoire du site.

Deux sondages ont eu lieu en novembre 2012. Par l'intermédiaire de ces tranchées, les archéologues ont pu mettre au jour le cimetière médiéval et moderne de Blanquefort.

« L'intérêt de ce site, explique l'archéologue, c'est une belle stratigraphie qui s'étend du XI au XIVe siècle et couvre quatre phases d'inhumations. Les vestiges les plus anciens concernent des sépultures en pleine terre avec un aménagement formé de trois moellons calcaires entourant la tête du défunt. Elles sont creusées dans le terrain naturel, une grave sableuse et blanche ». Deuxième couche en partant du sol, des tombes sans architecture de pierre, avec des morts peut-être uniquement protégés par une planche de bois.

Puis, apparaissent les premiers coffrages de pierre aux morphologies variées, comprenant un couvercle, suivis par les sarcophages à proprement parler. « Un petit bâtiment maçonné, qui daterait de la transition entre la fin du Moyen-âge et l'époque moderne, autour des XV-XVIe siècles, a été mis au jour. Il repose sur les inhumations antérieures, qu'il détruit en partie. Il s'agit d'une construction dont ne subsistent que les fondations de chaux de 3,45 m sur 2,60 rn, comprenant quatre compartiments séparés par une cloison. Cet ouvrage évoquerait un pourrissoir, lieu servant à rationaliser l'espace funéraire caractéristique de l'époque moderne », ajoute la scientifique spécialisée dans la conduite de chantiers en contexte urbain. Afin d'affiner la chronologie, il faudrait faire réaliser des datations au carbone 14.

Enfin, des ossements éparpillés furent découverts, attribués aux XVIII et XIXe siècles ; leur bouleversement est conséquent au déménagement du cimetière vers 1850, puis, aux travaux successifs conduits sur la place. En cas d'aménagement, le Service régional d'archéologie prescrira une surveillance de travaux.

Une plaque patrimoniale rappelant le passé de ce lieu, serait un bon moyen d’attirer l’attention des flâneurs, le texte pourrait commencer ainsi : « Passants, songez que de nombreuses générations reposent ici. »

Le nouveau cimetière

Le nouveau cimetière de Blanquefort, beaucoup plus vaste que le précédent, a été créé en 1809 ; il est bordé par la bien nommée rue du Repos, ancien « chemin de Bordeaux à Parempuyre. » Il a été agrandi une première fois en 1927 ; une autre parcelle lui fut ajoutée, vers le nord, par l'acquisition d'un terrain en bordure de la rue Jean Moulin, entre 1965 et 1970.

Une nouvelle extension du cimetière est nécessaire dans les années 2010. La solution de créer un nouveau cimetière loin du bourg est écartée au profit d’un accroissement de 3 000 m² au sud de l’actuel. Le cimetière compte à cette époque-là environ 1 480 concessions. Sa surface est de 14 500 m², sa saturation étant prévue d'ici deux à trois ans, le Conseil municipal du 14 novembre 2011 a décidé d'acheter un nouveau terrain attenant de 3 000 m² pour 500 000 euros dont la moitié est prise en charge par la CUB dans le cadre du contrat de co-développement signé entre les deux collectivités. « D'autre part, explique Pierre Laborde, conseiller municipal délégué aux ressources humaines, dialogue social et cimetière, une douzaine de tombes présentant des défauts d'entretien ont été repérées ; elles sont réputées abandonnées, c'est-à-dire qu'elles existent depuis plus de trente ans, et qu'elles n'ont pas connu d'inhumation depuis moins de dix ans. Lors de la démolition de ces sépultures, il a été trouvé un cercueil en zinc, celui d'un soldat. » Actuellement, il existe au cimetière de Blanquefort, un espace pour disperser les cendres, et tout autour le long du mur, un espace pour une trentaine d’urnes funéraires.

Textes extraits de :
          Blanquefort et sa région à travers les siècles de Guy Dabadie Imprimerie Samie, Bordeaux, 1952, p. 117 et 137).
          Blanquefort … une histoire de 3000 ans, Alain Tridant, Publications du G.A.H.BLE, 1988, p 26.
          La vie religieuse à Blanquefort au XXème siècle, Henri Bret, Publication du G.A.H.BLE, 2006, p. 56.

          Articles du journal Sud-ouest du 2 janvier 2012 et du 25 février 2014, Marie-Françoise Jay.