Entretien de l’église au XIXe siècle

La chapelle Saint-Ahon de Caychac ayant été démolie, on acheta les pierres pour la construction d'un pont dans ledit village. Mais Blanquefort n'en avait pas fini avec les travaux à l'église. En décembre 1822, un ouragan causa des dégâts au clocher. Les tuiles creuses furent remplacées par des ardoises, au prix de 171 francs. Au début de 1823, le clocher fut incendié par la foudre, baptisée « feu du ciel ». Les charpentiers se mirent aussitôt à l'ouvrage pour une couverture provisoire. On récupéra « 630 demi-kilos » de plomb des cloches.

Le Conseil arrêta le 5 mai 1823 :
« Art. I. - La vieille tour du clocher incendié sera démolie jusque dans ses fondements.
  Art. II. - Il sera construit un clocher sur l'emplacement de la sacristie existante.
  Art. III. - Le plan du clocher présenté par M. Corcelles, architecte, avec la tour carrée surmontée d'une flèche, est adopté.
  Art. IV. - Ce plan sera exécuté dans le plus bref délai en se conformant au devis estimatif s'élevant à 14 000 francs, réduit à 12 000 en considération de l'usage ou de la vente à faire des vieux matériaux, ainsi que de la diminution à espérer. »

Ces travaux furent payés par annuités de 1 000 francs, mais ils nécessitèrent les emprunts du 15 mai 1825 (5 000 F.) et du 17 décembre 1826 (4 916 F. 94), ainsi que d'une imposition extraordinaire de 6 398 F. 96.

Le 19 février 1826, eut lieu l'adjudication des travaux aux sieurs Bidou et Lacourrière. On décida également que « le dôme couvert en ardoise qui surmonte la toiture de l'église au dessus du sanctuaire est un objet d'entretien dispendieux et entièrement inutile »,qu'il serait supprimé et qu'on installerait aussi un paratonnerre. La démolition de l'ancienne tour donna lieu à des travaux plus longs et plus onéreux qu'on l'avait cru tout d'abord. Il fallut, pour démolir, fermer deux ouvertures en maçonnerie, ainsi qu'un réchappement pour garantir le mur se trouvant contre le grand autel. La nature du terrain exigea l'établissement d'un grillage sur pilotis enfoncé jusqu'à la rencontre de résistance majeure. Si bien que le total de la dépense s'éleva à : 20 575 F. 46.

Les souscripteurs du premier emprunt de 5 000 francs furent : MM. de Matha, Portal, Dariste, chacun 1 000 francs ; MM. Desgranges-Tauzin, Pelletraut, Castérat, Acquart, chacun 500 francs.

En 1829, à cette époque, des réparations importantes furent faites au presbytère : tapisseries, peinture, plâtrerie. Ces travaux provoquèrent un centime 1/2 additionnel au budget. Enfin, le 9 août 1832, on décida d'acheter une maison appartenant au sieur Caussade pour en faire l'école et la mairie et une partie de la maison et du jardin du sieur Dulau pour agrandir le presbytère (15 989 F. 44).

Le 31 juillet 1831, M. Pelletrau fut remplacé comme maire par M. Dariste fils, également député. Il est curieux de noter qu'à partir de ce moment-là, les municipalités seront beaucoup plus éloignées des intérêts religieux. On s'en aperçoit déjà le 9 février 1834 lorsque le Conseil décida la réduction du jardin du presbytère de 672 à 420 m².
Dans le procès-verbal de la réunion, il est dit que ce jardin avait « la figure désagréable et fatigante », qu'il « exigeait beaucoup de bras pour le cultiver et le curé se servant toujours de jeunes garçons qui se disposent pour la Première Communion, que tout suants de ce travail et arrivant dans l'église, lieu toujours très froid, il en résulterait beaucoup de maladies » !

De même, en réponse à une lettre de l'archevêque « exposant qu’ayant donné un vicaire à la commune, il serait nécessaire de faire quelques réparations au presbytère », le Conseil décida. à la majorité: « qu'un vicaire n'était pas nécessaire à la commune... que, dans ce moment, la commune se trouve surchargée d'impôts par les dettes qu'elle a contractées pour la confection du clocher, par les charges pendantes résultant de l'achat d'un local servant à la mairie, à la justice de paix, à l'école primaire..., que la commune ne possède aucun revenu ».

Solde du tambour de la commune.. . .  72 F.

En 1837, de nouvelles réparations urgentes au clocher sont décidées mais non effectuées. On se borna, l'année suivante, à faire réparer l'horloge et à établir un indicateur solaire pour 250 francs. Enfin, le 19 mai 1839, on peut lire ceci dans le registre des délibérations municipales :
« Il a été retenu qu'il était de la plus grande nécessité de faire au clocher de promptes réparations, principalement de le faire recrépir ; ensuite de faire mettre des persiennes aux ouvertures de la flèche, surtout à celles vers le Nord-Ouest, l'Ouest, le Sud-Ouest et le Sud, au nombre de 16 ; qu'il est certain que le dépérissement du clocher provient, en plus grande partie, d'avoir laissé ces ouvertures sans fermetures, qu'ainsi les eaux pluviales pénétrant dans la flèche y causent de très grands dommages. Que, lors de la construction de l'église, la commune se trouvant obérée par les fortes dépenses que cette construction occasionna, on fut forcé de terminer les travaux sans donner à l'église l'étendue suffisante à la population et la régularité de sa forme. Qu'encore l'ancien clocher ayant été démoli par suite d'un incendie causé par la foudre en 1823, la partie de l'église où était le clocher n'a pu être encore réparée, que pour y faire les réparations nécessaires il en coûterait à la commune la somme de 2 336 F. 30, tandis qu'en construisant un bas-côté à la partie Nord de l'église on lui donnerait de l'espace et de la régularité en faisant disparaître le délabrement apparent, que la dépense pour atteindre ce but s'élèverait tout au plus à 5 500 francs. Monsieur le Maire est prié de demander l'autorisation de faire opérer de suite les réparations nécessaires au clocher et de faire construire un bas-côté à la partie Nord de l'église. La commune demande à s'imposer extraordinairement en 1840 jusqu'à concurrence de la somme de 1 500 francs pour être employée aux travaux. »

Mais le préfet de la Gironde refusa d'entériner les décisions pour la construction du bas-côté. M. Boissel, menuisier à Blanquefort, fut chargé de confectionner les persiennes du clocher.

Le curé de Blanquefort bénéficiait tous les ans d'un supplément de traitement de 200 francs pour la célébration d'une seconde messe tous les dimanches et jours fériés. N'estimant pas cet effort suffisant, il écrivit au maire en mai 1851 pour lui demander une augmentation.

« Tant que mes forces ont suffi, j'ai tâché d'éviter à la commune un surcroît de dépenses que j’étais en droit de demander, mais j'aime à m'associer, aux dépens de ma santé, à tout ce qui peut alléger le poids des charges des habitants de ma paroisse... Le vicariat est reconnu à Blanquefort par le gouvernement... » En conclusion de sa longue lettre, l'abbé Laborde demandait qu'au prix d'un effort supplémentaire de la commune se montant à 300 francs, un vicaire puisse lui être adjoint, étant décidé à lui abandonner, pour sa part, les 200 francs qui lui revenaient de la municipalité et les 300 francs fournis par le gouvernement.
Mais le Conseil ne vota que 100 francs de supplément au curé Laborde et le vicaire ne fut installé qu'au début de 1857.

Signalons au passage que les curés de Blanquefort furent de 1656 à 1880 :

1656 : Philip.
1668 : Dulau.
1695 : Cholet.
1743 : Caussade.
1774 : Dugarry.
1783 : Dupoux.
1784 : Saincric.
1797 : Marcourt.
1804 : Poumicon.
1807 : Mathieu.
1828 : Cachet.
1836 : Laborde.
1873 : De Froger de l'Éguille.

D'autres travaux seront faits à l'église. Le 22 juillet 1856, le comte d'Albessard exposa que l'église était trop sombre et demanda la construction d'une ouverture dans la voûte. Le Conseil refusa, mais autorisa les ouvertures sur les parties latérales.

En 1859, le placement de la nouvelle horloge nécessita différents travaux d'une urgence absolue dans le clocher. Coût : 269 F. 58. En même temps, fut posée une nouvelle marche pour l'accession dans le bâtiment religieux. En 1862, le Conseil reconnut enfin que l'église avait le plus pressant besoin de clarté, déclara que « l'agglomération des fidèles doit y trouver des garanties pour la santé d'abord et une clarté suffisante pour se livrer aux lectures pieuses qui y sont faites », et décida « que le cintre existant dans le fronton ouest sera ouvert dans toute son étendue et garni d'un châssis en fer qui sera vitré et dans lequel sera établie une manche à vent perpendiculaire portant l'air à 50 centimètres de la voûte de la nef ».

À part des travaux accomplis à la fin du siècle, notamment par M. Édouard Avril, architecte, l'église Saint-Martin restera celle que nous connaissons aujourd'hui, avec son clocher si curieux, cause de tant de tracas aux édiles de la commune. À ceux qui s'étonnent de son architecture, disons que nous devons aux embarras financiers cités plus avant de ne pas en avoir un plus beau, dont le plan se trouve d'ailleurs à la sacristie.

Guy Dabadie, Blanquefort et sa région à travers les siècles, Imprimerie Samie, Bordeaux, 1952, p. 123-140.