Les conséquences climatiques : 1572-1779 

1572. La Garonne glace, devant Bourdeaus, aux festes de Noël, avec telle aspreté qu'il n'est loisible de naviguer et traverser la rivière (Chronique bourdelaise) et a continué le dit froid jusques au tiers de janvier.

1648. Disette de blé presque générale dans toute la France. Comme il était moins cher dans le Bordelais qu'en Espagne, des négociants demandèrent au duc d'Épernon la permission d'en transporter dans ce royaume, et ce gouverneur le leur accorda. Mais la populace irritée, ayant à sa tête quelques femmes du plus bas étage, s'opposèrent à l'embarquement des blés sur les quais de Bordeaux. Les jurats ne purent venir à bout de l'émeute qui ne faisait que grossir et le duc d'Épernon, en fureur, fut obligé de rapporter son autorisation d'exporter. Le Parlement, informé de ce qui se passait, donna un arrêt qui défendait tout transport de blé hors de la province. Ce fut le début des difficultés entre la Ville de Bordeaux et le Parlement, d'une part, et le duc d'Épernon, gouverneur de la Guyenne.

1660. Le vingt-unième du mois de juin 1660, environ les quatre heures du matin, il fit un tremblement de terre en la paroisse de Ludon en Médoc, qui escroula l'église, la maison curialle où j'étais et toutes les autres maisons ez environs, ce que j'ai voulu marquer ici comme chose bien extraordinaire - a subitunea et improvisa morte libera nos, Domine -. Gorribon. (Nous pensons qu'il faut traduire « escroula » par « ébranla » dans le texte du bon curé.)

1664. Environ le dixième du mois de décembre 1664, a commencé de paraître au ciel une comète environnée de feu et extraordinairement resplendissante dont la queue pendait vers l'occident ; sa situation était proche du midy et ne commençait à paraître sur les soirs à quatre heures de la nuit et disparaissait à demy aube, ce que j'ai voulu marquer icy pour l'avoir vu propriis oculis et en foy de ce ay signé : Gorribon, curé de Ludon, ab omni malo libera nos Deus.

1665. Le quatrième janvier 1665, environ les 6 à 7 heures du soir, a aussi apparu une autre comète dont la situation était proche du midy, toute environnée de flammes et sa queue tournée vers l'orient, de laquelle Estienne Barnagault, mon valet, venant en ce jour-là de Bourdeaux, me fit apercevoir, en foy de quoy ay signé pour icelle avoir vu ce jour et depuis la dite comète pendant presque tout ce moys de janvier. A flagellis iracundiae tuae libera nos, Domine. Amen. Gorribon, curé de Ludon.

1709. Le froid fut intense du 6 janvier au 23. La température demeurait entre - 18 et - 23° ; la rivière glaça et put être traversée à pied. Le vin des calices gelait ; on devait mettre des réchauds sur les autels pour dire la messe, et les doigts des laquais se collaient aux assiettes pour peu que celles-ci fussent mouillées (d'après un témoin). On ne pouvait couper le foin qu'à coups de poignard ou à coups de hache. Les vignes ne purent résister et tout ce qui dépassait le sol périt. Les semences furent gelées en terre, le gibier et la volaille disparurent exterminés. La population souffrit atrocement. Beaucoup moururent et les survivants se trouvèrent en proie à la plus affreuse famine. La plupart des pauvres, dit toujours le témoin, ne vécurent que de méchantes herbes.

1712. Cette année fut marquée par de terribles inondations qui ravagèrent le pays.

Le 2 septembre 1762, un ouragan renverse la flèche de l'église Saint-Michel à Bordeaux.

En 1774, le village de Soulac fut recouvert par les sables. De l'église ensevelie sous la dune, seul émergeait le faîte du clocher. L'édifice fut ensuite dégagé en 1859 jusqu'au sol du 14e siècle. Jusqu'à cette époque, on ne pouvait y accéder qu'en charrette à sable traînée par des bœufs et on attachait l'attelage au sommet du clocher. On voyait encore les anneaux de fer servant à cet usage à la fin du siècle dernier. Le haut du clocher lui-même avait la forme d'une balise et servait de signal pour la navigation.

Le 7 juin 1779, un ouragan violent ravagea les moissons et les vignes des paroisses de Saint-Médard, Blanquefort et Ludon. « Plusieurs particuliers, et notamment M. Séguineau, possesseur de La Lagune, firent tailler la vigne tout de suite ; le bois poussa, murit et fut très bon pour tailler en novembre ensuite, et celui que l'on laissa tel que la grelle l'avait laissé ne valut absolument rien et fut privé de récolte deux ans » (note du curé).

Paul Duchesne, La chronique de Ludon en Médoc, Rousseau frères, Bordeaux, 1960.