Les causes du transfert de l’ancienne église en 1854 

En 1840, l’ancienne église de notre commune se trouvait sur la place du 4 Septembre et les Eysinais de cette époque pouvaient être satisfaits. Après avoir menacé ruine, leur église a fière allure ; mais pour cela il a fallu réaliser de coûteux travaux de maçonnerie, de charpente et de couverture, installer une horloge et améliorer la décoration intérieure. Le conseil de fabrique vient même de commander à un facteur de Bordeaux un bel orgue à six jeux.

Il y a toutefois deux motifs d’inquiétude : le clocher et le cimetière. Les murs et la charpente du clocher ont besoin de « promptes réparations », le cimetière devrait être déplacé, d’abord pour respecter la loi mais surtout à cause des épidémies de choléra qui touchaient régulièrement les habitants du bourg. M. Farinel de la Forêt a même calculé qu’à raison de quarante morts par an le cimetière a accueilli 20 000 sépultures, ce qui n’a pas manqué de faire monter le niveau du sol de plus d’un mètre. Un petit effort financier et ces difficultés seront réglées. Mais d’autres problèmes plus politiques se posent.

L’église n’est capable d’accueillir que 600 fidèles pour plus de 2 000 habitants. Certains voient là la cause de la désaffection des Eysinais pour la religion (en 1840, on ne compte que 4 communiants et 40 communiantes pour Pâques contre 1 450 et 180 au Taillan dont la population n’atteint pas 1 000 habitants). Pour eux, il est nécessaire d’agrandir ou de reconstruire l’église. Il y a aussi la question du Haillan. Avec une volonté croissante, les Haillanais, s’estimant mal traités par la municipalité, veulent constituer une commune et une paroisse indépendantes. Une reconstruction de l’église en un lieu moins éloigné du Haillan pourrait calmer les ardeurs sécessionnistes.

Les projets et contre-projets se multiplient, les discussions s’éternisent et rien n’est fait pour enrayer le mal qui s’aggrave. Lorsque en décembre 1847 la foudre, « le feu du Ciel », abat le clocher, seuls des travaux de soutènement sont entrepris et les paroissiens continuent à la fréquenter alors qu’elle est décrite comme « église en ruine ou plutôt masure informe presque entièrement lézardée, étayée depuis 5 ans ». Pour des raisons évidentes de sécurité, elle est interdite au culte en janvier 1856.

En novembre de la même année, Léo Drouyn vient en relever le croquis, il note sur son carnet : « Cette église est dans un état déplorable et offre peu d’intérêt, son plan est formé d’une nef romane précédée d’un clocher carré et suivie d’une abside semi-circulaire. La nef a un bas-côté moderne. Le clocher actuellement maintenu par des étais a été au 16ème siècle renforcé par des contreforts angulaires. La partie supérieure n’existe plus. Les ouvertures dont il est percé sont de petites fenêtres à section droite et très évasées en dehors et en dedans, à l’ouest s’ouvrait une porte en plein cintre recouverte par un arc ogival au 16ème siècle. La porte actuelle, qui est du 15ème, s’ouvre au sud dans un avant corps roman en partie ruiné. À l’abside, on voit des contreforts plats ».

dessin-de-leon-Drouyndessin de Léon Drouyn du 4 novembre 1856.

Mais il est déjà trop tard, depuis 1854 la décision de transfert a été prise, le financement est assuré ; l’ancienne église est démolie en janvier 1857 et ses restes sont utilisés pour la construction de la nouvelle.

Article paru dans le Bulletin municipal d’Eysines de juin 2003, Michel Baron.