Les débuts de l'instruction publique en 1834 

Hormis le clergé, les familles nobles, certains membres des professions libérales, peu de gens savaient écrire. L'un des premiers administrateurs de la commune est particulièrement difficile à déchiffrer, mais il nous a paru être un bon exemple pour ceux qui auront le courage de lire le texte ci-dessous dont nous donnons la traduction en regard.

1acte

                               

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

avec sa retranscription et sa traduction en français actuel :

2acte

 

Contraints de s'exprimer en français, un idiome qui n'était pas leur langue maternelle, ils gardaient souvent les tournures et les expressions gasconnes. Les exemples sont nombreux : « Jey resu de... douze libres pour l' ouberture de la fose de soun mari », « le sain mars je resu de Nouel AucIer trois libres pour dus anées de ferme d'une corège de vigne »... « payé a M. Testas 46 libres quinze sous six deniers pour des sierges qu'il a fourni, huille, ansan (encens) pour l' églize péyé cy... »

 À chaque réunion du conseil municipal, il est d'usage d'élire un secrétaire de séance. En 1838, celui qu'on avait élu à l'unanimité avoua qu'il ne savait pas écrire, de même que deux de ses collègues. Il y avait fort à faire !

La première fois qu'il est question d'école, c'est en 1834. On n'estime pas nécessaire de créer un poste d'instituteur pour les deux ou trois élèves qui vont à Saint-Médard. Où les loger, d'ailleurs, puisqu'il n'y a pas d'école ?

Un instituteur privé s'installe quand même cinq ans plus tard et prend ces trois élèves pour cent francs par an. La formule semble avoir du succès puisqu'en 1841, Saint-Aubin demande son indépendance à l'instituteur de Saint-Médard car « l'éloignement de son école ne permet point de s'y rendre surtout dans la mauvaise saison ». Mais trois garçons continuent à aller à Saint-Médard. Dix ans plus tard, Saint-Aubin a encore son instituteur privé, M. Bouffartigues.

C'est en juin 1868 qu'on décide de construire une école. Seuls manquent les crédits comme on le verra plus loin. En 1875, on décide de créer une école mixte dont l'institutrice sera une congréganiste, puis on choisira finalement un instituteur laïque. Celui-ci, pour 1500 F par an sera chargé, en outre, du secrétariat de la mairie. Cinq garçons et quatre filles sont admis comme indigents à l'école que dirige M. Dubos auquel succéderont M. Rigal père puis le fils Rigal. En 1894, on adjoint au directeur une maîtresse de couture, mais il faudra attendre 1932 pour que soit créé un deuxième poste. L'évolution se poursuit mais les analphabètes sont encore trop nombreux. Pour 50 F par an, l'instituteur crée une classe d'adultes en 1901, mais nous ne savons ni pour combien de temps ni pour combien d'élèves. Les enfants prennent peu à peu l'habitude de fréquenter l'école en dehors des périodes où l'on a besoin d'eux aux champs ou derrière les troupeaux. Mais c'est très dur, surtout pour les enfants de Segonnes qui font leur six kilomètres à pied, matin et soir, en toutes saisons. Ils doivent arriver à l'école à huit heures du matin. L'hiver, chacun apporte sa bûche pour chauffer la salle de classe.

En 1911, sur demande de l'instituteur, le conseil autorise celui-ci à retarder l'heure d'entrée qui sera à huit heures et demie pendant l'hiver. Nous arrivons ensuite à la période contemporaine que certains d'entre nous ont vécue, mais il faudra attendre 1924 pour qu'un crédit de 28 F par an soit ouvert à chacun des 40 élèves leur permettant d'obtenir des fournitures gratuites. En 1928, l'hygiène progresse. Le conseil décrète que « le nettoyage de la classe, et notamment le lavage du parquet sera fait trois fois par an, pendant les vacances ». Vous avez bien lu, il n'y a pas d'erreur de frappe, c'est trois fois par an ! Dix ans plus tard on décide de balayer trois fois par semaine. Pour être objectif, il faut dire que les élèves assuraient à tour de rôle un balayage périodique après avoir arrosé le parquet, en larges « huit », avec une sorte d'entonnoir devenu depuis objet de musée.

Texte extrait : Chronique de Saint-Aubin-de-Médoc, René-Pierre Sierra, juin 1995, éditeur mairie de Saint-Aubin-de-Médoc, p 146-150.