Les maisons paysannes en 1785 

 

Aussi le lecteur sera-t-il peut-être intéressé à la description de La Brède, faite par une allemande Mme De La Roche, au cours de son séjour à Bordeaux en 1785 ; elle décrit ainsi une échoppe de La Brède (Revue historique 1911 p. 168) : « Je vous dirai aussi un mot de l'habitation des journaliers, car j'en ai visité une et je l'ai bien examinée. Figurez-vous une construction longue de 30 et haute de 12 pieds (10 m et 4 m) avec, au milieu, une cloison de chaque côté de laquelle se trouve la porte d'accès donnant sur la rue et du côté opposé à cette porte, une fenêtre haute de deux pieds et large d'un pied (0,60 m et 0,30 m). À chaque bout de la maison, se trouve une cheminée ainsi qu'un grand grenier qu'une tenture isole du reste de la pièce ; c'est là toute la maison. Cette pièce est carrelée, sauf dans un coin où se trouve un lit à deux, ordinairement garni de rideaux et bien installé, une armoire pour les vêtements, quelques ustensiles et un cadre pour la batterie de cuisine. Un deuxième coin est réservé aux bois et aux outils, un troisième à la table, et du quatrième un mauvais escalier ou même seulement une échelle conduisant par une trappe jusqu'au galetas. Deux familles vivent ainsi côte à côte, dans ces misérables pièces qui malgré tout sont généralement bien tenues. Les enfants d'un certain âge logent dans le galetas et les tout petit dans la pièce d'en bas. Dans chacune de ces baraques je trouvais des visages d'hommes souriants et plein d'affabilité qui me remercièrent de ma visite et je repris très heureuse le chemin de Bordeaux. »

À Saint-Médard, les maisons ne comprenaient habituellement qu'une seule grande pièce avec chai ou débarras attenant. Il en était ainsi au moulin de Gajac : la cuisine actuelle, diminuée par la dépense, servait de cuisine et de chambre pour toute la famille, des lits à rideaux occupaient les côtés de la pièce. La salle à manger est sur l'emplacement du chai et le bureau occupe la place d'un débarras. Une porte donnait accès dans la pièce unique et habituellement, une petite fenêtre était percée à droite ou à gauche de la porte d'entrée. Le plus souvent en dessous de la fenêtre on voyait une énorme pierre encastrée dans le mur et qui faisait saillie en dehors. Cette pierre était largement excavée à sa face supérieure puis creusée d'une profonde rigole jusqu'à son extrémité extérieure. C'était la pierre d'évier que l'on retrouvait dans presque toutes les maisons. Habituellement, le niveau du sol intérieur était en dessous du niveau du sol extérieur. La terre battue ou l'argile provenant des Ardileyres de Gajac formait ordinairement ce sol. Enfin, les maisons des paysans n'avaient qu'un rez-de-chaussée ; les maisons les plus importantes reconstruites à la fin du XVIIIe siècle telles que la maison Maizonnobe (boulangerie Lestage actuelle) ou la maison Lauba (appartenant la famille Ariès, charcutier, près de la bifurcation des routes de Lacanau et du Porge) ont conservé ce type de construction. Le presbytère et la maison Eyquem (la nôtre) furent les premiers immeubles qu'on éleva d'un étage en dehors du château du Bourdieu : Saint-Médard se ressentait de la prospérité de Bordeaux dans les années qui précédèrent la révolution.

Sources : notes du docteur Arnaud Alcide Castaing sur la paroisse de Saint-Médard-en-Jalles sous l’Ancien Régime et sur la commune de la Révolution au XXe siècle, dossier familial, 1946, 270 pages, p.27-28.