Les fermiers (vaches et lait) en 1945
La ruralité du Blanquefort d’avant-guerre ne fait pas de doute. Les fermiers sont nombreux, on compte une centaine de fermes. Nous nous appuyons sur différentes listes que l’administration fera établir sur plusieurs années. S’il y a en effet un domaine qui est contrôlé étroitement, en particulier durant la Seconde Guerre mondiale, c’est bien celui de l’alimentation.
On trouve, en 1945, 2 chiffres différents selon les états : 82 et 83, mais aussi celui de 77 dans une circulaire sans date. Les moyennes établies tiendront compte bien sûr de ces variantes. Nous trouvons par exemple une liste de 83 noms concernant l’état du cheptel et de l’imposition de lait à la date du 18 février 1945.
Nom, prénoms |
Adresse |
Bardet Pierre Raoul * |
Pontacq |
Baudiniere et Vergier |
Grand Clapeau |
Belot * |
Trembley |
Bernatets Jean |
Brignays (Bregnays) |
Berteau Louis |
Duras |
Bessieres Jean * |
Licquart |
Blanc Edmond * |
Caychac |
Bos Pierre Louis * |
Caychac |
Bos Pierre * |
La Rivière |
Braud René |
Laubarede |
Cabiro Louis * |
Andrian |
Cans Albert * |
Breillan |
Cardineau Gaston |
Ch Breillan |
Carrasset André |
La Rivière |
Cauderan Irène Vve |
Linas |
Chambariere Daniel | Barail Neuf |
Comte François | Florimond |
Couturou(S) Paul (Jean) * | Magnol |
Cousteau Jean | La Rivière |
Cricq Paul |
La Landille |
Da Rocha * |
Solesse |
Desanges Marcel |
Licquart |
Dubos Et Manuaud Vve |
Florimond |
Dubourdieu Pétronille (Maxime) |
Maurian |
Duchan (Duchamp) Jeanne |
Caychac |
Dugay François |
La Gravette |
Dugravier * |
Corbeil |
Dupuy Vve |
La Rivière |
Dupuy Augustin |
Andrian |
Dupuy Pierre |
Saint Ahon |
Duvert Jean |
Cimbats |
Ecole Agriculture |
Bechon |
Estrade Personne * |
Château Tujan |
Feydieu Léopold * |
La Rivière |
Frechaud Lucien |
Florimond |
Gautier Raymond Vve (Jeanne) |
Montigny |
Gautrat Antoinette |
Florimond |
Girardeau Jean * |
Linas |
Goffre Gabriel |
Trabuchet |
Gorphe Raoul |
Dinassac |
Labadie René |
Caychac |
Labeyrie Paul |
Vanneau |
Lacoste Pierre |
Linas |
Lagrange Ismaël |
Maison Rouge |
Lagrange Ulysse |
Port Du Roy |
Lauga Jean |
La Rivière |
Leglise Paul |
Tanaïs |
Marmiesse René * |
Breillan |
Martin Jean |
Saumos |
Massart Franck * |
Gilamon |
Maugey René |
Arroques |
Mercier Alexis |
Marotte |
Micau Georges |
Florimond |
Moncey Gabriel |
La Rivière |
De Montbel Florent |
Fleurennes |
Monanteau Abel * |
Galochet |
Mouchebeuf (Louis) * |
Liot |
Moustie Jean * |
L’isle |
Ornon Marcel (Jean) |
rue Jules Moreau (rue G Leclerc) |
Pardon Jean |
Laubarede |
Pardon André * |
Linas |
Pastureau Pierre |
Canteret |
Paucaut Henri |
Florimond |
Perrinjacquet Marguerite * |
Licquart |
Philippart Jo * |
Fongravey |
Pradier Jean |
Soustra |
Richard Joseph |
Florimond |
Riviere Pierre |
Caychac |
Riviere Charles * |
Linas |
De Rivoire * |
Baubens (Montagne) |
Romefort Antony |
La Rivière |
Roudey (Vve Peleu) |
Caychac |
Rouillard Joseph |
Pichery |
Rousseau Jean (Lacoste) |
Linas |
Roux Marcel |
Florimond |
Seguin Pierre |
Caychac |
Sempe Raymond |
Dulamon |
Sibrac André |
Bel Air |
Tchernikoff (Pierre) |
Dehez |
Triat Emilien |
Vanneau |
Vert Albert |
Florimond |
Videau Jean * |
Ch Labarde |
Vigneau Jean * |
Les Pins |
(ce qui figure entre parenthèses est tiré des autres listes… et la mention * indique la disparition des noms (25 ?) par rapport à une autre liste sans date)
Dans une autre liste du 6 mars 1945 (82 noms), figure aussi Merilleau Jean Robert Caychac
Dans une autre liste du mois d’avril 1945 (87 noms), on note encore :
Belloc
Brunetel (Voir Couturou)
Cabon
Clissey
Duverdier
Fossecave (Vve)
Gardere
Miqueau Joseph (est-ce Micau ?)
Rougier Pierre
Dans l’autre liste sans date de la boîte 13 (77 noms seulement et qui semble comporter des erreurs) on bute sur un mystère : 6 noms ont disparu, et 10 nouveaux apparaissent : avaient-ils été oubliés ?
Brouillet Léon (2 vaches)
Cabon Edouard (1 vache sans doute)
Courbin Louis (14 vaches) qui ne figurent nulle part ailleurs…
Dubucq (5 vaches)
Duprat Jean (4 vaches)
Lalande (1 vache)
Mathieu Victor (2 vaches)
Merilleau Robert (4 vaches)
Rambaud Jean (10 vaches)
Voellmy (7 vaches)
Ces différentes listes tournent autour d’une centaine de fermes identifiées comme telles et donc une centaine de noms de fermiers.
Localisation géographique
Ils sont localisés dans toute la commune La grande zone rurale du Blanquefort de cette période apparaît nettement.
Les plus fortes concentrations se situent dans les villages périphériques, proche des prés et pâturages au nord et à l’est de la commune : 14 dans les marais, 8 à La Rivière et à Florimond, 6 à Caychac et à Linas, 3 à Licquart et à Breillan, 2 à Andrian et les autres disséminés. 18 février 1945.
Dans une autre liste (B13), on peu déduire la localisation suivante : Caychac arrive en tête avec 14 implantations, suivi de près par la Rivière avec 13, puis Linas 12, Florimond 9, Peybois 8, Laubarède et Breillan 4 chacune, La Gravette, Licquart et Maurian 3, Andrian, Tujean, Vaneau 2 et les autres dispersées. Sur les 126 noms retenus dans cette liste, la grande majorité est située au nord de la commune, autour du pôle Caychac qui avec La Rivière, Peybois et Linas regroupe 38 % des exploitations et avec l’autre pôle important des marais (23%) constitue pratiquement les 2/3 de l’ensemble agricole. C’est là en effet que sont les terres.
Dans une circulaire n°107 (sans date), on voit apparaître dans une colonne le nombre de personnes qui vivent sur l’exploitation. On peut penser qu’il s’agit des membres des familles et en même temps du personnel qui travaille dans la ferme, mais cela n’est pas spécifié.
La colonne des vaches indique 537 unités, celle des personnes 417 ; on relève ensuite la production totale : 751 800 litres, ce qui est laissé sur l’exploitation : 62 550, et la dernière colonne indique l’imposition individuelle : 689 250.
Si l’on croise les chiffres de ces différentes colonnes, on obtient les résultats suivants :
Le troupeau moyen de vaches de Blanquefort pendant la guerre, 537 sur 77 fermes, est de 7 vaches par exploitation, mais cela va de 1 à 24 vaches.
Le nombre de personnes sur exploitation, 417 sur 77 fermes, est de 5,41 et va de 3 à 16 (l’école d’agriculture fait exception avec le chiffre de 41 personnes).
La production totale de lait sur une année est de 751 800 litres, plus donc que l’année 1945 où l’on a trouvé 525 000 ou 550 000 litres, selon les sources. Blanquefort produit 2 060 litres par jour et chaque vache 3,83 litres par jour aussi, mais il est vrai que toutes ne sont pas laitières…Le ratio est de 77 % de vaches à lait sur l’ensemble. La moyenne de production des 77 fermes est de 9 763 litres par an, cela va de 1 400 litres à 33 600. Le lait laissé sur l’exploitation est de 62 550 litres par an en moyenne, soit 171 litres par jour, ce qui laisse à chaque personne 0,41 litres par jour (171 : 417). On peut penser que c’est à partir de ces chiffres que bien d’autres personnes de la commune ont pu obtenir du lait, qui a servi d’échange et de troc. L’imposition de Blanquefort est en moyenne de 8 951 litres par an et par ferme, et de 1.888 litres par jour pour l’ensemble de la commune.
L’importance du cheptel : on trouve les chiffres suivants selon les listes :
475 vaches le 18 février 1945
481 le 6 mars 1945
537 sans date, peut-être en 1943 ou 1944 ?
Le 18 février 1945, 475 vaches sont donc recensées dont 367 vaches en lait, et en moyenne 5,7 vaches par exploitation et 4,42 vaches « en lait », mais si l’on enlève le troupeau le plus important de 29 vaches, les moyennes passent à 5,43 et 4,12.
Leur répartition par exploitation : entre 1 et 5 : 53 soit 65,5 % et 51 soit 71,8 %
entre 6 et 10 : 11 soit 13,6 % et 10 soit 14 %
entre 11 et 15 : 13 soit 16 % et 8 soit 11,3 %
entre 16 et 20 : 3 soit 3,7 % et 1 soit 1,4 %
entre 26 et 30 : 1 soit 1,23 % et 1 soit 1,4 %.
Une quinzaine de fermiers ne possèdent par exemple qu’une seule vache…et 21 n’en ont que deux.
À ce sujet, on peut observer que les fermiers constituent la majorité des possesseurs de vaches, et donc de producteurs de lait, mais que certains artisans ou d’autres professions pouvaient avoir une ou deux vaches ou un cheval, et que vivant de leur travail, ils avaient en supplément un petit apport de nourriture dans leur jardin et leurs bêtes. On rencontre aussi le cas de familles bordelaises venant se replier à Blanquefort dans leur maison de campagne et faisant l’acquisition d’une vache pour avoir du lait.
Après le départ des Allemands, les autorités françaises insisteront sur la nécessité de poursuivre la production de lait pour les besoins de la population française qui affrontait toujours la pénurie alimentaire.
Une lettre circulaire de la Préfecture de la Gironde 2° bureau du Ravitaillement du 26 mars 1945 (n°1073) dont l’objet est l’imposition en lait du 2° trimestre 1945 rappelle les chiffres de cette imposition : 48 600 litres pour la commune, soit 1 620 par jour en avril 1945, ainsi que mai et juin. Elle relève aussi certaines anomalies des mois précédents en fonction de l’état de lactation des troupeaux. Elle précise encore que les excédents de lait seront primés pour une attribution d’un kilo d’issues pour 3 litres de lait. Elle continue ainsi : « J’insiste encore sur la nécessité de faire toute la propagande voulue auprès de vos Administrés pour qu’ils remplissent leur devoir civique. Il convient, en effet, de réparer immédiatement les effets catastrophiques provoqués sur l’enfance par un rationnement rigoureux imposé par l’ennemi. En outre, afin de réaliser une économie appréciable de carburant et de pneumatiques, je vous prie d’user de toute votre influence auprès des producteurs éloignés du passage du ramasseur pour qu’ils rapprochent le lait de son circuit. Je vous signale, enfin, pour dissiper tout malentendu que l’imposition mensuelle notifiée comprend les besoins en lait de la commune représentée par les cartes de lait entier qui y ont été distribuées. Pour le Préfet, le Secrétaire Général : Giberton. »
En février 1945, le nombre de litres soumis à imposition sur l’ensemble de la commune est de 1 180 litres par jour, chiffre qui varie de 2,50 pour 1 vache et de 90 pour le troupeau de 29, soit 3,10 litres par vache, mais on trouve aussi 2,85 pour un troupeau de 7 ou de 14 vaches, ou 3,33 pour 3 ou 6 vaches. Les variations des moyennes semblent mystérieuses… Par extrapolation, on devait trouver 1 307 litres en mars (31 jours). Un autre relevé du 26 mars 1945 (circulaire MP n°1073 du Préfet de la Gironde, 5° division 2° bureau. Ravitaillement, signé par le secrétaire général, Giberton) fait apparaître les chiffres suivants d’avril à octobre 1945 :
48 600 litres pour avril soit 1620 litres par jour
60 264 « mai 1944 «
58 320 « juin 1944 «
Un autre relevé manuscrit reprend les mêmes chiffres pour ces 3 mois et les poursuit jusqu’en octobre (!), mais sous une autre forme. Il fait ainsi apparaître en 2 colonnes les impositions et les livraisons
Impositions : 40 176 « et livraisons : juillet 1296 «
40 176 « août 1296 «
36 288 « septembre 1209 «
34 992 « octobre 1128 «
Soit au total pour ces 8 mois, une imposition de 348 996 litres, et donc de 1 425 litres par jour (sur 245 jours), et 3,90 litres par vache (367 vaches laitières). La colonne de livraisons fait apparaître un surplus de livraisons impressionnant : 421 216 pour ces 8 mois, soit 72 220 litres de plus, et donc 1 719 litres par jour durant 8 mois, soit 4,70 litres par vache. Si l’on extrapole sur une année, on trouve le chiffre de 525 000. Un autre chiffre rajouté au crayon indique 550 000 litres pour l’année, (résultat proche…), soit 1 507 litres par jour à Blanquefort et 4,70 litres par vache.
Texte d’Henri Bret, à partir des archives municipales.