Le commerce au 18e siècle

Un mémoire, datant de 1750, conservé à la bibliothèque municipale de Bordeaux, fournit des renseignements précieux sur le commerce de cette deuxième ville de France.
A cette date charnière, certains voulaient arracher la vigne pour faire place à des constructions, alors que d’autres, au contraire, préféraient développer le vignoble et surtout les plantations proches de Bordeaux.

Monsieur de Tourny, l’embellisseur de Bordeaux, n’arriva qu’en 1743.

La quantité de vin, chargés à Bordeaux, chaque année, tournait autour de 70 000 tonneaux, et on débouchait nos bouteilles en Angleterre, en Hollande, en Suède, en Normandie, en Picardie, mais aussi en Amérique. 
Il existait cinq grands crus principaux : Graves, Palus, Entre-Deux-Mers, Langon, Barsac, Preignac. Les vins de Graves regroupaient les châteaux de Lafite, de Pontac Haut Brion et de Margô.
Les 70000 tonneaux de vins étaient exportés par 1493 vaisseaux ou barques dont 275 pour la Hollande.

Dans son mémoire, à l’académie de Bordeaux, l’abbé Bellet, en 1740, notait qu’en plus de l’important trafic du port qui représentait 400 à 500 embarcations, 1468 navires étrangers étaient chargés dans le port de Bordeaux dont 550 Hollandais, 200 Anglais, 165 Américains et 120 Allemands.

 

Vie économique 

1735 – 1736 : l’importation d’Angleterre de toiles imprimées dites « indiennes » est interdite.
1736 : la fabrication des bas au métier est encore interdite afin de protéger les travaux manuels.
1732 : 1ère grève des moissonneurs à Paris.
1738 : fondation de la manufacture de porcelaine de Vincennes.
1738 – 1739 : grave disette à cause de mauvaises récoltes, pluies torrentielles, et l’action des spéculateurs.
1740 : nombreux soulèvements populaires.

 

Société 

1735 : la France compte deux millions de ruraux et quatre millions de citadins.
1736 : le chancelier Aguesseau rappelle aux curés de tenir les registres paroissiaux en deux exemplaires signés par les parties, puis de déposer un exemplaire aux greffes du Tribunal. 
La qualité de la personne décédée et la mention de sa profession deviennent obligatoires dans les actes de sépulture.

 

Transports et communication 

1737 : les moyens de transports usuels sont les suivants :
     le cheval (commode et rapide),
     les carrosses à quatre roues,
     les coches volants (chariots couverts non suspendus) qui parcourent 25 lieux par jour soit 100kms,
     les carabas (char à banc, grande voiture à cheval : lourds, lents et incommodes),
     les galiotes rapides et légères (navires de petite taille),
     les chaises de postes, les plus rapides, mais les plus onéreuses,
     les coches d’eau trainés par les chevaux.

Vie matérielle 

Au cours du siècle, le lit, généralement fermé par plusieurs rideaux, est poussé vers le coin de la chambre ou caché dans une alcôve. L’enveloppe de la couette de lit est plus souvent en coutil et le contenu en plumes de poule. Les couvertures sont en laine verte chez les personnes aisées avec une pelasse de peau de mouton, et en laine blanche chez les autres, avec une pelasse de peau de chien. Alors que les bourgeois et les villageois aisés commencent à utiliser des draps de près de six à sept mètres. Le reste de la population se contente de draps de trois mètres environ. Les oreillers sont encore rares.

Au fil des siècles, les murs des appartements et des maisons des personnes aisées et des classes moyennes se parent de portraits de famille, de paysages champêtres, de peintures religieuses, de crucifix, de glaces, de miroirs, de boiseries, de trumeaux, d’appliques et de tenture de soie.

La vaisselle en faïence peinte s’expose sur les dressoirs de la salle à manger.

1737 : première mention des « cabinets à soupapes », dits aussi « lieux à l’anglaise » (nos toilettes actuelles).
1739 : François Marin publie les « Dons de Cormus » ou « les délices de la table », un important recueil de recettes.
1735 : découverte fondamentale du caoutchouc, de la quinine et des expériences sur le cuivre. 

Les domiciles et les liens des témoins du mariage avec les conjoints deviennent aussi obligatoires.
A partir de cette date, la bonne tenue des registres paroissiaux s’affirme dans tout le Royaume.
C’est vers cette époque que la formation du couple et notamment l’officialisation de la fréquentation fut désormais l’objet d’un cérémonial : des cadeaux, dont une bague qui remplace la pièce d’argent autrefois offerte en arrhes devant le père de la promise.
Les contrats de mariage sont très nombreux au XVIIIe siècle, souvent rédigés dans la même journée que le mariage et qui montrent l’égalité des apports des deux futurs époux.

1739 : Les enfants de l’hospice de la Charité meurent du « muguet » (infection de la bouche provoquée par un champignon). L’abandon d’enfant est passible d’une amende de cent livres aux profits des hôpitaux.

 

1738 La Corvée Royale sous Louis XV 

Le contrôleur général, le Sieur d’Orly, établit le recours à la Corvée Royale.  l cite « J’aime mieux leur demander des bras qu’ils ont que de l’argent qu’ils n’ont pas ».
Le Sieur d’Orly généralise le système de la Corvée Royale par la construction et l’entretien des routes de France.
Les chemins et les routes du royaume sont répartis en sections, et les sections en ateliers à raison d’un atelier situé à moins de trois lieues, soit 12 kms, d’une paroisse.

Les corvéables sont répartis en deux catégories :                                                                                
les manœuvres qui œuvrent à la réalisation des chaussées et à l’extraction des matières premières et les laboureurs et les voituriers qui prennent en charge le transport des matériaux nécessaires. Et cela, six jours par an au minimum, mais parfois jusqu’à trente ou quarante jours suivant l’état de la chaussée, en plein moment des travaux de printemps ou d’automne.

Tous les hommes valides, âgés de 16 à 60 ans, avec bête de somme, chars et outils, sont convoqués pour travailler sur la chaussée, sous la surveillance d’inspecteurs et de sous-ingénieurs. Les punitions sont infligées par les inspecteurs ou les subdélégués.

Le clergé, la noblesse et ses domestiques, les collecteurs, les septuagénaires, les maîtres de poste, les instituteurs, les bergers de plus de cent bêtes et les citadins sont exemptés de la Corvée Royale.
Les bourgeois envoient leurs domestiques ou autres à leur place.

En 1749, Monseigneur Louis Aubert de Tourny, intendant de la Généralité de Guyenne et embellisseur de Bordeaux, a comme collecteur de la paroisse du Taillan, Jean Monlun.

 

La livre 

La livre tournois n’était qu’une monnaie de compte.
La livre valait 20 sols, 1 sol valait 1 denier.
Seuls les sols et les deniers étaient des monnaies réelles. Quelques exemples :

1708 : une pièce de vignes de 6 règes : 37 livres.
1708 : 4 règes de vignes : 15 livres payés en Louis et demi louis d’argent de 3 livres dix sols et 35 sols pièces et autre bonne monnaye.
1708 : revenus annuels d’un fermage d’une maison : 30 livres.
1708 : petite maison en pierre plus deux chambres plus four à pain plus jardin : 90 livres.
1734 : une dot de 400 livres en argent plus trousseau : 45 livres donnés à la future épouse pour sa robe de mariée.
1734 : un habit nuptial de marié : 36 livres ou 6 écus de 6 livres.
1741 : 30 livres pour l’habit nuptial pour l’épouse plus trousseau.
1746 : un bois et des taillis de 64 ares ? livres?
1749 : une robe de mariée : 60 livres.
1754 : un coffre : 6 livres.
1771 : un moulin, des prés, une maison d’habitation, grange, jardin 1500 livres annuelles.
1777 : 5 charrettes de fumier : 48 livres.
1777 : vignes, bois, terre labourable, jardin, chai, cuvier, maison, pressoir, cave: 150 livres annuelles d’une mère veuve à son fils.
A cette époque, une jeune fille ayant eu une dot n’avait plus aucun droit à l’héritage parental

                      

Bibliographie 

* « Les Ayquem de Montaigne » éditions Féret
* « Contexte historique et généalogique » de Thierry Sabot
* « Les Maires de Bordeaux » des Dossiers d’Aquitaine

Jean-Pierre Toulouse, descendant de vignerons de Germignan du XVIe au XVIIIe siècle, membre de l’Association Internationale des Amis de Montaigne. juin 2021.

 

Note du CHB : En France, les registres paroissiaux existent depuis la fin du Moyen Âge, ils ont été rendus obligatoires en 1539 pour les baptêmes, en 1579 pour les mariages et les sépultures, en double exemplaire en 1667, ils consignent les grandes étapes de la vie du paroissien. 
C’est l’ordonnance de Villers-Cotterêts de 1539 qui rend obligatoire la tenue des registres de baptêmes dans les paroisses. Puis l’ordonnance de Blois en 1579 impose l’enregistrement d’une part des mariages afin de lutter contre les mariages clandestins et d’éviter la bigamie et d’autre part des sépultures. La tenue en double exemplaire est instaurée par une ordonnance d’avril 1667 en exigeant le dépôt annuel d’un exemplaire au greffe des tribunaux d'Ancien Régime. Elle ne devient systématique qu’après une nouvelle ordonnance de 1737.