Le Médoc après la révolution 

La Révolution de 1789 va marquer un grand tournant de notre histoire.

Le Médoc était resté à l'écart de ses prémices. Nos ancêtres s'intéressaient peu aux affaires publiques. Peut-être leur atavisme et le lointain souvenir des luttes ayant ravagé les terres et détruit les biens de leurs pères les avaient-ils rendus prudents.

Quoi qu'il en soit, à l'assemblée régionale chargée de désigner les représentants aux États-Généraux, les Médocains ne figurèrent qu'au nombre de trente-trois sur un effectif total de deux cents membres. Parmi eux, l'abbé Piffon, curé de Saint-Christoly, se signala par son talent oratoire, se fit le porte-parole des prêtres, notamment dans un discours du 10 mars 1789. Les événements allèrent vite, mais notre région ne s'agita que trois ans après, Bordeaux étant « la seule cité de premier ordre qui n'ait pas été tachée par l'effusion de sang », tout au moins au début de la période révolutionnaire.

Et, chose curieuse, le paisible Médoc connut les premiers troubles. En effet, séduits par les idées nouvelles, de nombreux paysans voulurent entrer en possession des terres ci-devant seigneuriales et les transformer en communautés.

Deux propriétaires, s'étant opposés à ce désir demandèrent de l'aide à Bordeaux. Pour disperser les attroupements, on leur envoya des formations de police quelque peu hétéroclites, dans lesquelles voisinaient les soldats de l'armée royale, les gendarmes et les volontaires. Le 24 octobre 1789, à 4 heures du matin, quatre chaloupes transportèrent ces troupes à Macau. Le débarquement se fit en ordre dispersé et le rassemblement n'eut lieu qu'à plusieurs kilomètres. Cette démonstration de la force armée suffit à ramener le calme. Seuls, deux paysans de Lamarque opposèrent quelque résistance et tirèrent quelques coups de feu, payant de leur liberté ce geste. Bernadau écrit dans ses Tablettes : « Cette expédition est hautement approuvée par le public ». Les autorités, désirant donner un éclat particulier à cette affaire, décrétèrent la loi martiale « à son de trompe par le héraut d'armes de la ville suivi des huissiers et sergents, tous à cheval et en habit de livrée précédés du guet à cheval et du drapeau rouge, qui doit être arboré comme en temps d'émeute ».

Parmi les députés aux États-Généraux, figurait, au titre du clergé, Monseigneur de Saint-Sauveur, évêque de Bazas et abbé de l'Isle-en-Médoc.

Guy Dabadie, Histoire du Médoc, imprimerie Samie, Bordeaux, 1954, p169-170.